Callas by Pierre-Jean Rémy

Callas by Pierre-Jean Rémy

Auteur:Pierre-Jean Rémy
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Albin Michel


3

Le règne de Callas – son règne absolu – va encore durer deux ans. Pour qui connaît tant soit peu ce que représente une carrière de chanteuse, la brièveté de celle de Callas commence à nous apparaître dans sa terrible rigueur. Quoi ? Nous venons juste de la sacrer, à Milan, première soprano dramatique et coloratura de son temps, et déjà, alors que New York l’acclame pour la première fois, nous parlons de la fin d’une époque ? On en a froid dans le dos…

C’est bien pourtant de cela qu’il s’agit : Callas a brûlé les étapes, elle a vécu avec une ardeur inouïe ses années de jeunesse vocale, et elle s’est épuisée – on l’a épuisée, nous l’avons épuisée, à l’aimer jusqu’à la détruire, jusqu’à la laisser exsangue lorsque ses moyens n’ont plus été ceux de l’Abigaïl de 1949, ni même ceux de l’Anna Bolena et du Pirate, dernières grandes créations lyriques de sa carrière en 1957 et 1958 avant le Poliuto final… L’Anna Bolena, c’est le triomphe absolu sur Milan, et le Pirate, c’est le chant du cygne et la fin de Callas à Milan. Son retour, plus tard en 1964, sera une autre histoire, une autre femme, une autre voix – la même artiste, pourtant.

Deux années encore à couvrir de ce règne tumultueux…

Passé les émotions de New York, l’année 1967 commence sous les auspices les plus favorables pour le couple Meneghini-Callas. On est rentré chez soi, à Milan, via Buonarroti, et Maria mijote pour son Titta les petits plats qu’il aime bien. L’avenir paraît très clair : certes, Callas n’a pas ouvert la saison à Milan puisqu’elle était occupée ailleurs, mais elle a des projets un peu partout dans le monde : cette Anna Bolena, donc, et l’Iphigénie en Tauride de Gluck à la Scala, des tournées à Londres, à Vienne, en Suisse, en Allemagne, le Festival d’Édimbourg et, consécration suprême de l’enfant prodigue qui retourne au pays, un concert à Athènes dans l’amphithéâtre d’Hérode Atticus. Elle doit en outre revenir aux États-Unis, mais à San Francisco cette fois, où elle s’est engagée à chanter aux mois de septembre et d’octobre.

Tous ces plans sont des plus prometteurs, et pourtant deux des voyages prévus n’auront pas lieu, et un autre se terminera en catastrophe. Comme si le Destin, déjà, avait aperçu Callas et avait décidé de jouer avec elle.

Mais, dès les premiers jours de l’année, Callas se lance à cœur perdu dans la vie nouvelle que ses quelques semaines de New York lui ont fait entrevoir, et elle s’y avance triomphalement. Vêtue d’écarlate devant un parterre choisi qui paie rubis sur l’ongle plusieurs dizaines de dollars une place au nom de la solidarité des bien-pensants après l’intervention soviétique en Hongrie – anti-communisme de gala oblige – elle chante à Chicago des airs de Lucia, de la Somnambule, du Trouvère, de Norma, mais aussi l’extraordinaire « In questa reggia » de Turandot, alors que quelques minutes auparavant elle s’était joué des difficultés aériennes et des transparences des « ombres



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