Une histoire naturelle des sens by Claude Gudin

Une histoire naturelle des sens by Claude Gudin

Auteur:Claude Gudin
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Editions du Seuil


Le goût des plantes

Puisque la gustation, sur le plan biologique et physiologique, est le résultat d’une lente et vieille évolution, il n’est pas illogique de se poser la question du goût chez la plante bien qu’on sache que sa « nourriture carbonée » est faite essentiellement de dioxyde de carbone et de la lumière. C’est surtout au niveau du choix des minéraux que la question se pose et peut trouver des équivalents animaux. La pression osmotique cellulaire du végétal est régulée par un équilibre entre les ions : sodium, potassium et calcium, magnésium. C’est la quantité et la qualité des sels contenus dans la sève (l’eau) qui déterminent les échanges. Ces échanges sont réglés au niveau des membranes cellulaires par des canaux spécifiques munis de transporteurs moléculaires pour ces ions (qui existent d’ailleurs aussi dans les cellules animales et en particulier dans les neurones du cerveau). On trouve ainsi les plantes qui ont du goût pour le sel et l’accumulent dans leurs tissus. C’est le cas de la famille des chénopodiacées (betteraves, chénopodes), comme celle des salsolacées (la salicorne que l’on trouve en bord de mer). D’autres fuiront les sols riches en calcium, on les dit calcifuges4. C’est le cas de la plupart des plantes de sols acides comme celles des terres de bruyère : les azalées par exemple. À l’inverse, les calcicoles se plaisent sur les sols riches en calcium sans que cela entrave l’assimilation du fer. D’autres encore auront un goût, une affinité moléculaire pour la silice ; c’est le cas de la plupart des graminées qui lui doivent leur caractère fibreux et rigide.

On peut aussi se poser la question à propos des plantes carnivores. Certes, leur croissance, leur métabolisme global sont dus comme pour tout végétal à la photosynthèse et à l’azote qu’elles puisent dans les nitrates du sol. Il n’empêche qu’elles sont capables par différents stratagèmes d’attirer, de capturer et de digérer des insectes. On connaît sept genres de plantes carnivores – autant qu’il y a de péchés capitaux : darlingtonia, dionea (ou dionée), droséra, népenthès, pinguicula, sarracenia et utricularia. Certaines, comme les sarracenia et les népenthès, piègent les insectes dans des urnes, avec ou sans couvercle mobile, formées par des feuilles ; d’autres, comme la dionée et la drosera, capturent leurs proies grâce à des poils visqueux spécialisés. Il existe une centaine d’espèces de drosera, dont la taille varie de quelques millimètres à un mètre cinquante. Les feuilles disposées en rosette sont rondes ou allongées et les poils qui les couvrent sont souvent rouges et suintent une sorte de glu. Les gouttelettes de l’extrémité des poils scintillent au soleil et contiennent une substance huileuse sécrétée par les poils glandulaires. On les trouve dans les tourbières. Si une mouche du genre syrphe, attirée par les poils étincelants de lumière, atterrit sur une feuille, elle est aussitôt engluée sur la drosera. Les poils se referment et emprisonnent la victime, la plaquant contre le limbe de la feuille qui sécrète des sucs digestifs. En trois jours, la mouche est digérée et les poils-tentacules s’ouvrent à nouveau.



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