Une femme a passé by Christian Jouhaud

Une femme a passé by Christian Jouhaud

Auteur:Christian Jouhaud
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Editions Gallimard
Publié: 2018-01-15T00:00:00+00:00


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Dans l’appendice-supplément de la deuxième édition, Freud mentionne deux autres ouvrages de Jensen sur lesquels « un ami a attiré [s]on attention », L’Ombrelle rouge et Dans la maison gothique. Il note rapidement la proximité de certains motifs de ces deux romans avec Gradiva et le fait que Jensen avait choisi de les réunir sous un titre commun. Mais les a-t-il lus ? En tout cas, il ne les utilise pas pour compléter ou approfondir sa lecture de la Fantaisie pompéienne.

Je trouve dans la traduction de L’Ombrelle rouge donnée par Jean Bellemin-Noël1 quelques pages qui me font penser à des images de lanterne magique. Dans le récit d’un épisode de visite de ruines, et d’égarement, je crois voir apparaître un instant une figure allégorique de la description freudienne du psychisme comme apparent chaos (avant sa mise en ordre topique) ; figure allégorique qui se superpose à la fantasmagorie trompant la vision et les sentiments du héros. La métaphore de la lanterne magique permet de se représenter l’éventuelle rencontre de la théorie et de la fiction non comme domination de la première sur la seconde, mais comme la réciproque incrustation de deux fantasmagories dans la même image. Une fenêtre qui, dans le roman de Jensen, s’effondre sur le point précis qui marquait la séparation entre un dehors et un dedans, tous deux ruinés, vient rompre l’enchantement de ce spectacle joué dans ma lecture.

Midi propice aux fantômes : à l’heure où Gradiva va apparaître à Pompéi, le héros de L’Ombrelle rouge, Wolfgang von Altfeld, escalade la pente boisée qui le conduit aux ruines d’un vieux Burg. C’est la deuxième fois de la journée qu’il fait cette promenade, mais il ne reconnaît pas la forêt qu’il traverse. Il arrive aux ruines : « C’étaient bien elles, et en même temps ce n’étaient pas elles. » « En outre, aucun son n’émanait de tout cela : pas un chant d’oiseau. Un monde désert saisi par l’immobilité de la mort », tout comme Pompéi quelques instants avant l’apparition. Altfeld franchit le mur d’enceinte et entre dans les ruines. Dans le labyrinthe de murs effondrés, de remparts encore debout et de ronciers impénétrables, il perd la conscience du temps et de lui-même : « Altfeld voyait tout cela et il ne le voyait pas. C’était sous ses yeux, qui le percevaient, mais impossible d’y associer l’ombre d’une pensée. Ce n’était rien d’autre qu’une image vue en rêve. »

Décrivant l’égarement de son héros, Jensen s’attarde à faire voir un aspect étrange du décor. Sous les apparences chaotiques de la ruine, un monde de dessous se dessine et s’incruste progressivement dans la vision, non d’Altfeld mais du lecteur. Ce sont des « structures effondrées » : « Un enchevêtrement souvent déconcertant de passages montants ou descendants, de saillies, d’oubliettes, de pignons en escalier, de poternes à voussure à l’air libre donnant sur le vide. […] Passé et oubli ! »

Prisonnier de ces « structures effondrées », le promeneur hébété éprouve une étrange fatigue. C’est alors qu’« il aperçut



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