Un Tribunal au garde-à-vous by Inconnu(e)

Un Tribunal au garde-à-vous by Inconnu(e)

Auteur:Inconnu(e) [Inconnu(e)]
La langue: fra
Format: epub
Publié: 2020-08-04T06:18:42+00:00


CHAPITRE XV

« Vous avez bien travaillé pour Hitler… »

À 21 heures, le lieutenant Mendès France se tient debout face aux juges qui entrent dans la salle d’audience et s’asseyent. Le président Perré avertit le public qu’il ne tolérera pas que se renouvellent les manifestations inadmissibles de l’après-midi. « De telles manifestations sont dignes de réunions publiques, mais ne sont pas de mise dans une France envahie, meurtrie. Elles ne sont pas françaises. Le public doit demeurer parfaitement silencieux, sous peine de sanctions (1). » Puis il donne la parole au commissaire du gouvernement pour que celui-ci prononce son réquisitoire.

Le colonel Degache, qui lit ses papiers, parlera fort peu de temps : dix minutes à peine. Pour lui, la désertion est évidente. D’une part, le 10 mai, « Mendès France n’a pas répondu à la convocation qui était faite par avis ». Degache précise qu’il ne parle de ce jour-là que « pour mémoire ». Mais cette première absence doit être retenue contre l’accusé « à titre de moralité (2) ». D’autre part, Mendès France a reçu, le 10 juin, l’ordre de se rendre à Bordeaux. Cet ordre était immédiatement exécutoire. « Il y a trente-six motifs, aussi sérieux les uns que les autres, qui faisaient que cet ordre était à exécuter d’extrême urgence. » Ces motifs, le commissaire du gouvernement ne perdra pas son temps à les rappeler. Mendès France a mis neuf jours pour aller de Paris à Bordeaux. Il s’est embarqué sur le Massilia avec sa famille. Son odyssée s’est terminée à Casablanca le 24 juin.

Faut-il parler des délais ? Les règlements n’en tolèrent, selon le commissaire du gouvernement, que deux, un délai de route et un délai de grâce. Le délai de route était de deux jours, et Mendès France a pris en fait trois jours. Mais Degache veut se montrer généreux : « C’est ce délai de trois jours que j’adopte bien que j’eusse pu prendre celui de deux (3). » Il prenait donc fin le 13 juin à 24 heures. Reste le « délai de grâce » de quatre jours prévu par les règlements militaires. Celui-ci se terminait le 17 juin à 24 heures. Le 17 juin à 24 heures, le lieutenant Mendès France était donc devenu déserteur. Il était déserteur le 24 juin quand le Massilia était arrivé à Casablanca. Il l’était déjà — depuis deux jours — quand il s’était rendu à Mérignac, le 19 « Mendès France, en droit et en fait, doit être considéré comme déserteur ; ceci ne se discute pas ».

Mais le colonel Degache ne peut pas ne pas revenir au Massilia, car le départ sur ce navire est, chacun le sait, la charge morale qui pèse sur cet officier déserteur. Pourquoi Mendès France choisit-il de s’embarquer ? « Il saisit l’occasion qui lui offre une perspective autrement attrayante. Partant avec le Massilia, il ne part pas seul. Et dans ces conditions il n’hésite pas. À ce moment-là, il ne perd plus une minute. » Et par précaution il



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