Question de picaillons by Carter Brown

Question de picaillons by Carter Brown

Auteur:Carter Brown [Brown, Carter]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Littérature américaine, Policier
Éditeur: Gallimard - Série Noire
Publié: 1965-01-02T23:00:00+00:00


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Les longs couloirs étincelants du bâtiment administratif bourdonnaient d’activité quand je les arpentai à onze heures quarante du matin. Une contrescarpe de trois secrétaires et de deux adjoints personnels se dressait entre moi et le donjon qui abritait la chapelle privée de Jason Wagner, mais je n’eus qu’à prononcer mon nom pour le voir s’écrouler, telle la vertu d’une starlette sur le divan d’un producteur. J’étais attendu, M. Wagner était dans son bureau, par ici s’il vous plaît, entrez donc. En toute autre circonstance, je me serais senti flatté, mais dans ma situation présente, je me fis l’effet du prophète Daniel entrant chez Bouglione le jour de la grève des bouchers.

Il portait ce matin-là un complet, comme tout le monde, et je me dis que le kimono était réservé aux heures supplémentaires. À part ça, rien n’avait changé depuis la veille, pas même l’énorme cigare qu’étreignaient ses doigts boudinés.

— La trêve est terminée depuis dix minutes, Holman, fit-il d’entrée de jeu. Alors faites vite.

— J’imagine que le moment est mal choisi pour parler de morale et de secret professionnel, n’est-ce pas ? dis-je.

Je marchais sur des œufs pas frais.

— Quelle morale ? Votre client, c’est moi, depuis l’instant où je vous ai téléphoné hier soir !

Sous les paupières lourdes, les petits yeux m’examinèrent attentivement et n’apprécièrent manifestement pas ce qu’ils voyaient.

— Un client qui s’est imposé à moi, rectifiai-je. Comme je vous l’ai dit hier, j’ai été engagé avant votre coup de fil.

Le gros cigare balaya les airs et expédia mon problème à la poubelle.

— Je vous ai dit que je voulais le nom de votre client, fit-il d’une voix tranchante comme un couperet.

— Et je vous ai dit que je ne vous le donnerai pas, rétorquai-je d’une voix coupante comme un tranchoir. Et je n’ai pas changé d’idée.

— Dans ce cas, fini de bosser pour l’industrie du cinéma, Holman. Adieu.

— Mais je n’ai pas fini de bosser pour ma cliente, monsieur Wagner, lui rappelai-je, et plus je m’occupe de cette affaire, plus j’ai l’impression que ce n’est pas seulement votre secrétaire particulière qui s’y est trouvée mêlée.

Il pinça les lèvres et ça lui fit un bleu :

— Qu’est-ce que vous me blablatez là, Holman ?

— Gladys Pearson a été assassinée alors qu’elle se trouvait en compagnie d’un homme qui fait chanter ma cliente. Vous m’avez dit vous-même qu’elle avait accès à des dossiers confidentiels, dans votre bureau. Ma cliente n’est peut-être pas la seule victime, après tout. Gladys a pu se servir de ces renseignements confidentiels pour permettre à Westerway de faire chanter d’autres gens.

— Je ne comprends pas de quoi vous voulez parler, et je m’en tamponne, gronda-t-il. Dehors !

— D’autres gens, voyons voir, poursuivis-je imperturbablement. Je crois qu’il faudrait chercher un homme nanti d’une situation apparemment bien assise, mais qui aurait quelque chose à cacher. Une chose qu’il n’aurait pu dissimuler à sa secrétaire particulière et dont la découverte le démolirait. Pour un homme comme celui que j’envisage, il s’agirait de bien autre chose qu’un simple scandale privé.



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