Potentiel du sinistre by Thomas Coppey

Auteur:Thomas Coppey [Coppey, Thomas]
La langue: eng
Format: epub
ISBN: 9782330017231
Éditeur: Éditions Actes Sud
Publié: 2012-12-28T05:00:00+00:00

Sans attendre que Chanard apprenne à manager au gré d’expérimentations hasardeuses, les RH l’envoient suivre deux nouvelles journées de formation. Car en devenant manager, on devient aussi pilote. Pilote de la performance. Apprendre à piloter devient alors nécessaire si l’on vise le bien de son groupe, et c’est sur cette notion précise que porteront les deux journées de training. Le coach est spécialiste de la question ; comme Leralic, il commence par projeter une citation sur le mur. André Gorz cette fois : La mesure quantitative comme substitut du jugement de valeur rationnel confère la sécurité morale et le confort intellectuel suprêmes : le Bien devient mesurable et calculable ; la décision et le jugement moraux peuvent découler de l’application d’un procédé de calcul objectif impersonnel, de quantification et n’ont pas à être assumés dans l’angoisse et l’incertitude par le sujet. Chanard note qu’il y a encore une majuscule sur un nom commun, mais il ne souhaite pas intervenir sur ce point. Le coach ne s’égare pas en glose, il commence.

Au cours des dernières années, de nombreuses entreprises ont mis en place des tableaux de bord, des balanced scorecards, des systèmes de pilotage de la performance appelés Key Performance Indicators (KPI). Leur mise en œuvre a parfois été simplifiée, dans le sens d’un nombre réduit d’indicateurs sur lesquels portent tous les efforts. Ceci en corrélation avec un système de motivation fondé sur la pression et la concurrence, et non sur l’envie et la réalisation de soi.

Les systèmes de pilotage de la performance et les indicateurs stratégiques étaient censés améliorer la cohésion de l’entreprise en menant au dépassement de soi. Or, ce pilotage a échoué : qui a pris un instant pour s’arrêter et visualiser en son for intérieur des situations où chacun s’était trouvé performant ou non performant ? Qui ? La question doit être posée sans pour autant alimenter un sentiment de culpabilité. Cette façon de poser la question doit renvoyer ceux qui l’entendent à leurs doutes, habituellement évacués dès lors que la réponse concerne d’abord un “je” prompt à se défausser sur le collectif, sur un pouvoir diffus, impossible à localiser.

Certes, l’époque est compliquée, mais nous ne sommes pas les premiers à en vivre une pareille. D’autres époques ont connu une ouverture sans précédent vers des civilisations éloignées, et cela est souvent allé de pair avec un renforcement du capitalisme. Les managers, même de très haut niveau, ne sont plus les maîtres du jeu mais bien les serviteurs de l’actionnariat sous toutes ses formes. Il en résulte plusieurs conséquences négatives. Le quotidien du management est fait de road-shows, de communication, ainsi que de systèmes de bonus et de récompenses alignés avec les intérêts des actionnaires ou le cours de la Bourse, la sphère du management devient médiatique, et préfère de plus en plus les leaders visibles aux managers, perçus comme franchement trop besogneux. L’attractivité de toutes les professions liées à cette financiarisation ne cesse de croître ; à leur sortie de l’école, la majorité des étudiants concernés souhaite œuvrer dans les fusions-acquisitions en banque d’affaires, ou dans des fonds d’investissement.

Télécharger

Déni de responsabilité:
Ce site ne stocke aucun fichier sur son serveur. Nous ne faisons qu'indexer et lier au contenu fourni par d'autres sites. Veuillez contacter les fournisseurs de contenu pour supprimer le contenu des droits d'auteur, le cas échéant, et nous envoyer un courrier électronique. Nous supprimerons immédiatement les liens ou contenus pertinents.