Palmyre Veulard by Rod Edouard

Palmyre Veulard by Rod Edouard

Auteur:Rod, Edouard [Rod, Edouard]
La langue: fra
Format: epub
Tags: 19ème sc., Littérature Suisse
Éditeur: Gekogeke - Gigatribe (Gekogeke - TAZ)
Publié: 1881-11-10T14:28:40+00:00


Ainsi, toujours poussés vers de nouveaux rivages,

Dans la nuit éternelle emportés sans retour…

Ne pourrons-nous… ne pourrons-nous jamais…

– C’est drôle… Hier je l’avais retrouvée tout entière, cette strophe… Tu ne te la rappelles pas, Palmyre ?…

Certainement non, Palmyre ne se la rappelait pas. Elle affectait d’écouter pour penser plus à l’aise à son Auguste ; ou peut-être, la musique des vers ayant évoqué les souvenirs de sa jeunesse, entendait-elle chanter dans sa mémoire quelque vieux refrain de Bobino. Et ses tête-à-tête avec un moribond, dans une chambre d’hôtel, par des jours éclatants et chauds, lui semblaient insupportables. – Ses brusqueries en devenaient plus fréquentes, ses mots plus durs ; elle en étalait avec plus d’affectation ses indifférences réelles.

Gabriel, repoussé dans ses tendresses par l’aveu de la crainte de la contagion, traité avec une indifférence croissante et frisant la haine, fut de nouveau torturé par ses plus mauvais soupçons, par ses terreurs les plus aiguës. Il conjura son médecin de lui dire toute la vérité : le médecin obéit. Et il eut une vision nette des misères de sa mort isolée, il sentit courir dans ses os le froid de sa tombe solitaire.

En même temps, un travail se faisait dans son esprit.

Les distractions continuelles de Palmyre, ses sorties sous un prétexte souvent banal, sa précédente assiduité dans la famille du pasteur malgré son antipathie pour la contrainte, tout cela lui ouvrit presque les yeux. Mais il ne songea même pas à Auguste, – garçon insignifiant, muet devant sa mère, et qui semblait toujours préoccupé de quelque crainte vague ou du calcul de ses moindres actions.

Ses soupçons se portèrent sur M. Réval, dont le tempérament vigoureux, tout de chair et de sang, devait avoir d’étranges révoltes contre les exigences de sa position. Sans doute, Palmyre s’était trouvée sur son chemin à propos pour le consoler de sa femme sèche, bilieuse, acariâtre… Il y avait dans leur conduite à tous deux de singulières coïncidences ; depuis le jour où la cure s’était ouverte pour elle, Palmyre était devenue plus douce ; sans doute, elle faisait patte de velours pour mieux dissimuler les choses… Puis, quand les rumeurs publiques avaient détaché d’elle le parti protestant, quand elle s’était retrouvée sans distraction dans l’ennui de ses devoirs de garde-malade, elle avait de nouveau ouvert la carrière aux cruautés de son instinct… Dans le village, on causait de cela ; il y avait des commères qui savaient tout. Mais, à lui, on ne lui disait rien : le public veillait à sa sécurité comme il veille à celle des maris trompés… Et pourtant, s’il avait eu la moindre certitude, il aurait tiré de cette fille une vengeance éclatante ; il l’eût rejetée nue au ruisseau.

Mais il ne voulait pas se condamner lui-même à la solitude sur un soupçon si vague… Et il se faisait des reproches : lui, le riche blasé, n’avait-il pas fait le rêve absurde, pardonnable au plus à un collégien de dix-sept ans, de racheter une âme, de purifier une souillure, – semblable à



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