Nous ne savions pas : Les Allemands et la Solution finale, 1933-1945 by Longerich Peter

Nous ne savions pas : Les Allemands et la Solution finale, 1933-1945 by Longerich Peter

Auteur:Longerich, Peter [Longerich, Peter]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Essais, Historique
Éditeur: Héloïse d'Ormesson (Éditions)
Publié: 2006-01-01T10:39:51+00:00


Distance, sympathie, hostilité : du comportement quotidien de la population allemande vis-à-vis des Juifs

Dans son étude sur les réactions des Allemands aux persécutions contre les Juifs, David Bankier cite de nombreux cas solidement documentés d’Allemands ressentant honte et culpabilité face aux persécutions ou exprimant de la compassion et cherchant à aider les Juifs de diverses façons. Selon lui, ce sont des preuves importantes du fait que la population dans son ensemble n’était nullement indifférente au sort des Juifs, mais qu’elle réagissait à des informations, plus ou moins précises, et aux rumeurs(991).

Si l’on se penche sur les informations rassemblées par le Foreign Office britannique de 1942 à 1944 sur le comportement quotidien de la population allemande vis-à-vis des Juifs, il s’en dégage une double impression. Un rapport de la cellule de renseignement de la représentation britannique à Stockholm daté du 7 juillet 1942 indique par exemple que personne n’osait généralement aider les Juifs très mal nourris ou leur adresser un regard aimable. À propos du comportement de la population vis-à-vis des Juifs dans le tramway, on peut lire : « Pendant le trajet, ils ne sont victimes d’aucune humiliation parce que la population est trop lessivée et indifférente pour cela(992). »

Deux mois plus tard, la même cellule de renseignement de Stockholm décrivait une scène dans le métro de Berlin : une jeune fille aurait exigé d’une femme juive qu’elle lui cédât sa place. « La dame s’est levée, et personne n’a accordé la moindre attention à l’incident. » Mais il arrivait également que des passagers laissent leur place aux Juifs. En général, la passivité des gens était « décourageante(993) ».

En mai et juin 1943, la cellule de renseignement britannique de Stockholm rapporta, à la lueur d’entretien avec des Autrichiens en visite en Suède, que de nombreux compatriotes, y compris des nationaux-socialistes, se détournaient du régime à cause des persécutions antijuives(994). En juin 1943, à l’occasion d’un séjour dans la capitale suédoise, un journaliste allemand n’hésita pas à dire que les gens se comportaient vis-à-vis de la question juive de façon apathique, tout en éprouvant en même temps une sympathie considérable envers eux. Pour lui, ce comportement s’expliquait par le fait que le régime n’avait pas rendu publiques les dernières grandes déportations à la fin du mois d’avril 1943(995).

Un SS qui séjourna à Stockholm au printemps 1943 à l’occasion d’une visite chez des parents, expliqua devant ses proches qu’en Allemagne, la question juive ne jouait pas un grand rôle, que la peur de la défaite occupait le premier plan(996). Pratiquement personne ne réagissait encore à la propagande antisémite, écrivit un ouvrier suédois rentré d’Allemagne en septembre 1943(997).

En avril 1944, Hoare, l’ambassadeur britannique à Madrid, fit parvenir au ministre des Affaires étrangères Eden le rapport détaillé d’un journaliste espagnol qui avait été correspondant pendant deux ans à Berlin. On pouvait y lire : « La compassion a neutralisé la haine, si bien qu’aujourd’hui, les Allemands, même s’ils ne penchent pas en faveur des Juifs – car il ne faut pas oublier que le



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