Ni poète ni animal by Irina Teodorescu

Ni poète ni animal by Irina Teodorescu

Auteur:Irina Teodorescu
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Flammarion
Publié: 2019-07-15T00:00:00+00:00


Septembre

J’écrivis d’autres poèmes, et ce tout au long de cette année 1989.

Dès mon entrée au collège (à savoir dès le déménagement de nos classes A B C D du troisième au premier étage de l’établissement et dès l’instauration du régime à plusieurs enseignants, un par matière), je m’attelai à séduire la professeure de roumain – équivalent du français –, qui était par ailleurs la directrice du collège.

J’étais en quelque sorte tombée amoureuse d’elle lors de son premier cours. Elle nous avait raconté comment elle avait été interpellée un jour par un hérisson dans le trolleybus. L’insectivore, très persuasif, l’avait convaincue de l’introduire dans son sac – en toile cirée, comme tous les sacs de l’époque, et heureusement, car un simple sac en plastique n’aurait jamais résisté avec tous ses piquants – et de l’emmener chez elle.

Désormais, elle avait un hérisson très bavard dans son appartement.

Je me disputai longuement avec un garçon aux taches de rousseur qui m’avait déjà énervée le matin de la rentrée en m’arrosant avec son pistolet à eau pendant le salut et l’hymne, soit la cérémonie d’ouverture de l’année. Il soutenait mordicus que ce que la professeure de roumain nous avait relaté n’était que pure fantaisie. Bien entendu je ne lui donnai pas raison, il était évident qu’elle nous avait dit la vérité, il s’agissait d’une dame plus âgée que ma mère et, vu sa permanente, beaucoup plus respectable.

Au déjeuner du dimanche suivant, je racontai l’histoire du hérisson et cette fois-ci personne ne rit. J’eus beaucoup de mal à mener mon histoire jusqu’au bout. Parvenue au moment où le hérisson se met à l’aise chez la professeure de roumain, je peinais à trouver mes mots, tellement je sentais mon public hostile. Lorsque je me tus, Dani dit de sa voix flasque et aiguë : « Vous feriez mieux de laisser cette enfant tranquille. » L’une de mes deux ou trois sœurs – probablement celle que j’ai vue il y a quelque temps à Lyon – me posa des questions sur mes autres cours pour changer de sujet.

Rétrospectivement j’ai compris que ma famille, surtout mon père, considérait mon statut de collégienne comme très important, un changement scolaire essentiel : j’étais grande, point final. Terminé les rêveries ou autres croyances loufoques.



Télécharger



Déni de responsabilité:
Ce site ne stocke aucun fichier sur son serveur. Nous ne faisons qu'indexer et lier au contenu fourni par d'autres sites. Veuillez contacter les fournisseurs de contenu pour supprimer le contenu des droits d'auteur, le cas échéant, et nous envoyer un courrier électronique. Nous supprimerons immédiatement les liens ou contenus pertinents.