MA DOUBLE VIE PARTIE 1 by Sarah Bernhardt

MA DOUBLE VIE PARTIE 1 by Sarah Bernhardt

Auteur:Sarah Bernhardt [Bernhardt, Sarah]
La langue: fra
Format: epub, mobi
Tags: Autobiographie
Éditeur: Les Bourlapapey Bibliothèque numérique romande
Publié: 2013-06-02T10:36:14+00:00


Arrivées toutes deux à Marseille, ma femme de chambre s’en fut aux renseignements : ils aboutirent à nous faire monter sur un abominable bateau marchand, un caboteur, sale, puant l’huile et le vieux poisson, une horreur.

Je n’avais jamais fait de voyage en mer. Et je m’imaginais que tous les bateaux étaient ainsi et que je ne devais pas me plaindre.

Après six jours de mer démontée, on nous débarqua à Alicante. Ah ! ce débarquement ! Je dus sauter de bateau en bateau, de planche en planche, risquant cent fois de tomber à l’eau, car j’ai le vertige. Et ces petites passerelles sans rampes, sans cordes, sans rien, jetées d’un bateau à l’autre, pliant sous mon faible poids, ces petites passerelles me semblaient une corde tendue dans l’espace.

Épuisée de fatigue et de faim, je descendis dans le premier hôtel qui me fut indiqué.

Quel hôtel !… Une maison de pierre, aux arcades basses. On me donna le premier étage. Jamais ces gens-là n’avaient vu deux dames descendre dans leur maison.

La chambre à coucher était une vaste pièce, basse de plafond. Et, comme ornements, il y avait, rangées en guirlandes, d’énormes arêtes retenues par des têtes de poissons. En clignant des yeux, on aurait pu prendre cet ornement pour de fines sculptures antiques. Mais non, c’étaient des arêtes de poissons.

J’avais fait dresser un lit pour Caroline dans cette chambre sinistre. Nous avions glissé les meubles contre toutes les portes ; et je m’endormis toute vêtue.

Je n’osais me coucher dans ces draps, moi qui avais l’habitude des draps fins et parfumés à l’iris, car ma jolie maman avait, comme toutes les Hollandaises, la folie du linge et de la propreté ; et elle m’avait inculqué cette douce manie.

Il devait être cinq heures du matin quand j’ouvris les yeux, par instinct sans doute, car aucun bruit ne m’avait éveillée. Une porte, donnant je ne sais où, venait de s’ouvrir, et un homme passait la tête. Je poussai un cri strident et me jetai sur ma petite Vierge que je brandissais folle de terreur.

Courageuse, Caroline, éveillée en sursaut, s’était précipitée vers la fenêtre qu’elle ouvrit, criant : « Au feu ! Au voleur ! Au… tout !… »

L’homme avait disparu, la maison fut envahie par la police ; et je vous laisse à penser ce qu’était la police d’Alicante il y a quarante ans.

Je répondis aux questions qui me furent posées, par un Hongrois qui était vice-consul et qui parlait français. J’avais vu l’homme. Il avait la tête coiffée d’un foulard ; il avait de la barbe et un poncho sur l’épaule ; je ne savais rien de plus.

Ce vice-consul hongrois, qui, je crois, représentait la France, l’Autriche et la Hongrie, me demanda la couleur de la barbe, du foulard et du poncho de ce brigand.

Mais il faisait trop sombre pour que j’aie pu distinguer au juste les couleurs.

Le brave homme se montra fort irrité de cette réponse. Après avoir pris des notes, il resta pensif un moment et donna l’ordre d’aller chez lui porter un mot.



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