L'infirmière d'Hitler by Robotham Mandy

Auteur:Robotham, Mandy
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: City Edition
Publié: 2019-07-23T16:28:23+00:00

22

De nouveaux démons

Eva eut de la visite le lendemain matin. Magda Goebbels débarqua au Berghof, les bras chargés de fleurs et de chocolats « pour la patiente », l’entendis-je dire. On m’enjoignit de me rendre sur la terrasse sans tarder, et je fus dûment questionnée sur l’avancement de la grossesse. Lors de ces visites, Eva se comportait comme une enfant effrayée par une tante dominatrice, tandis que Magda s’épanchait avec force et hypocrisie sur son soulagement de savoir que la mère et l’enfant se portaient bien. Sa propre frustration crevait les yeux.

Mais cette visite ne fut pas sans joie. Peu après, je vis la frêle silhouette de Christa contourner la maison pour prendre l’allée qui menait à mon chalet.

— Anke !

Nous nous étreignîmes comme des collègues qui se seraient perdues de vue depuis longtemps.

— Comment avez-vous trouvé une excuse pour venir ici ?

— Les canneberges, dit-elle avec un grand sourire. J’ai convaincu la maîtresse qu’elles étaient bonnes pour empêcher le retour d’une infection, et je pense qu’elle se serait mal vue refuser.

— Et c’est qu’elles le sont, en effet, j’en suis bien contente ! Je mourais d’envie d’avoir un peu de compagnie, de pouvoir parler à quelqu’un.

Christa me mit au courant des affaires en cours chez les Goebbels. Les Alliés renforçant peu à peu leurs positions, Joseph était d’une humeur exécrable, si bien qu’à la maison, tout le monde marchait sur des œufs. Les échanges qu’elle avait pu surprendre entre le mari et la femme étaient amers et hostiles, Joseph supportant mal d’attendre l’aboutissement de son nouvel outil de propagande.

— À la façon dont il en parle, je suis sûre qu’il pense à ce bébé comme à un nouveau modèle de char ou d’avion, ironisa Christa.

Elle jeta soudain un regard à la ronde et repéra un garde patrouillant dans le périmètre. Il s’approchait, visiblement en proie à un ennui profond. Il était jeune et probablement séduit par le joli visage de Christa. L’uniforme de domestique de la jeune femme lui assurait que ni elle ni moi ne risquions de causer des problèmes.

— On va descendre par le petit chemin pour aller cueillir des fleurs pour la maîtresse, dit-elle en lui adressant son plus beau sourire.

Il acquiesça et suivit longuement des yeux sa fine silhouette tandis qu’elle m’entraînait sur le sentier menant à la Teehaus. Je me sentais un peu mal à l’aise de m’y rendre sans Eva ou sans permission.

— Pourquoi est-ce qu’on va par là ? demandai-je alors que nous ralentissions le pas.

— Oh, on ne sait jamais, répondit Christa. Je commence vraiment à croire que les murs ont des oreilles, vous savez.

Elle leva des yeux suspicieux vers les arbres au-dessus de nos têtes.

— Pourquoi ? Qu’est-ce qui se passe ?

— J’ai été contactée.

Elle me regarda en face, les yeux éclairés d’un mélange de peur et d’excitation.

— Comment ça, contactée ? Par qui ?

— Je ne sais pas trop. Une femme allemande, qui m’a dit qu’ils savaient. À propos du bébé.

Je m’arrêtai et essayai de digérer ce que je venais d’entendre.

— Comment ça, ils savent ? Et de qui parle-t-on ?

— Ils savent que c’est le bébé du Führer, et connaissent en gros la date du terme.

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