L'homme de ma vie by Manuel Vázquez Montalbán

L'homme de ma vie by Manuel Vázquez Montalbán

Auteur:Manuel Vázquez Montalbán [Montalbán, Manuel Vázquez]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Policier
Publié: 2000-01-14T16:00:00+00:00


Je suis si heureuse… !

Le pharmacien dit que ma conjonctivite vient d’un excès de lumière, il était très sérieux et circonspect en me disant ça, pendant que j’essayais de retenir mon fou rire, je trouve extraordinaire que mon « éblouissement » puisse se soigner avec un collyre, j’y travaille.

Je pressens ou, mieux, je subodore des problèmes, maintenant qu’en plus d’être un mythe sans failles tu t’es révélé un homme chaleureux, accessible, gentil, inquiétant, perturbant, singulier, imprévisible. Au poids que représente la tyrannie perpétuelle d’un mythe (les dieux ne sont jamais rassasiés en fait de sacrifices et d’offrandes), je dois ajouter le joug, l’oppression d’un homme aussi intéressant, aussi plein de charme.

Dernière chose, quand tu veux m’appeler, n’importe quand, fais-le en pensant à toi, je n’ai rien d’une ingrate et je ne suis pas insensible aux marques d’intérêt porté à mon bien-être émotionnel, mais dorénavant, quelles que soient les relations que nous aurons, si nous devons en avoir, il faut que chacun y trouve son compte, sans obligation de part et d’autre qu’il soit de même nature, évidemment.

Je suis heureuse, heureuse, heureuse. Mets la musique que tu veux, je me sens d’une générosité sans limite. De tous les malheurs qui affectent l’humanité, le plus amer est qu’il nous faut avoir conscience de beaucoup et n’avoir de pouvoir sur rien. La conscience ne nous empêche pas de commettre des péchés, elle nous empêche d’en jouir, hélas !

Un seul mot prononcé dans le calme de cette nuit m’a placée entre mon passé et mon avenir, telle l’embarcation entre la profondeur des océans et les hauteurs de l’espace. Yes, oui, je suis Yes et le secret du bonheur n’est pas de faire toujours ce qu’on veut mais de toujours vouloir ce qu’on fait.

Probablement, le plus inattendu a été tes mains. Me rappeler tes mains. C’est étrange que ce soient les mêmes mains que tu avais enfant, parce qu’on dirait encore des mains d’enfant, sur lesquelles j’ai distingué les ravages des dents sur les ongles et dont j’ai senti, quand nous nous sommes quittés, le toucher chaud et tendre ; ces mains avec lesquelles tu esquisses pour toi-même des silhouettes d’assassins ou de voleurs avant de les trouver ; ces mains avec lesquelles tu essaies des décoctions assaisonnées de champignons. Merlin ? Des mains disciplinées qui à aucun moment n’ont pénétré l’espace diagonal, biaisé, oblique, diamétralement opposé où il s’est placé. Tout le salmigondis compliqué de ta drôle de personnalité s’éclaire quand on regarde tes mains et je ne m’en étais pas rendu compte à l’époque, quand j’étais Yes, la jolie (ou seulement gentille ?) fille de son père, le tout-puissant Stuart-Pedrell.

Ta nature est le résultat d’une perpétuelle addition ; elle ne semble pas avoir laissé tomber quoi que ce soit derrière elle, ce n’est pas l’habituelle évolution de quelqu’un qui cesse d’être ceci pour devenir cela. J’ai l’impression que tu ne renonces pas au passé, que tu ne te raidis pas devant le présent et que tu es attentif devant un avenir quel qu’il soit.



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