Les rapaces de Vesta by Jeffrey Lord

Auteur:Jeffrey Lord [Lord, Jeffrey]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Fantastique
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00

CHAPITRE XII

Le crissement du gravier réveilla Blade. L’instant d’après, tous ses muscles durcis par l’attente, il entrouvrait les paupières et voyait se dessiner devant lui la merveilleuse silhouette d’Alnaël, ondulant dans une transparence bleutée. Il pouvait voir jusqu’au grain de sa peau ivoirine, l’ombilic tourné comme celui d’un jeune enfant, les longues cuisses fuselées qui se pliaient lentement pour s’asseoir près de lui. Les seins d’Alnaël étaient comme les museaux des belettes, trottant d’un pas décidé dans une basse-cour, prêtes à se ruer sur les volatiles…

— Tu ne dors pas, allons. Mon beau guerrier d’honneur…, fit-elle en découvrant une rangée de perles sous la lèvre pulpeuse.

Il se redressa et ouvrit grands les yeux. Elle était illuminée par une lumière qui ne venait de nulle part, un bleu céruléen. Le feu se mourait, et elle avait les mains vides. Comme si l’étrangeté de son apparition n’était pas flagrante, elle demanda, tout en remontant ses genoux sous son menton :

— Tu ne me demandes pas d’où je viens ?

— D’où viens-tu donc, Alnaël ? Je ne comprends pas…

— La montagne est à moi. Je couche dans ses flancs et elle m’a accouchée. Nul ne peut entrer sans que je le sente. Elle est comme moi, la gardienne de Bilika.

— La gardienne ? A-t-elle un pouvoir magique ? Que doit-on faire si l’on veut passer de l’autre côté ? demanda Blade.

— Tu me demandes le secret d’une vie, Blade ? Qu’as-tu donc fait pour mériter cela ? Allons, dis-le-moi ?

— Pourquoi es-tu donc revenue, Alnaël ? Tu as failli mourir, sur le bateau. Ne comprends-tu pas que mes pouvoirs sont grands ?

— Les rapaces t’ont averti que le chemin serait encore semé d’embûches. Tu es blessé à la tête… Pourquoi as-tu continué ? demanda Alnaël sans répondre.

— Je suis venu remplir une mission. Lorsque j’en aurai terminé avec, je repartirai. Mais pas avant, comprends-tu ?

Il pouvait voir son visage, d’une si grande beauté qu’une fois de plus son cœur d’airain s’emballa, comme celui d’un jeune homme à son premier rendez-vous.

— Un homme tel que toi ne doit pas être le valet d’un gouvernement ou d’une cité, Blade ! Comment peux-tu, toi, si brave, si fort et si fou, accepter d’obéir comme n’importe quel petit soldat ? s’irrita Alnaël.

— C’est parce que je suis si fort, répondit Blade. L’orgueil ne m’aveugle pas… La puissance et la gloire m’indiffèrent. Seuls les malheureux ont besoin de richesses de plus en plus grandes, et de repousser les limites de leurs terres…

— Mais toi ? Qu’est-ce qui te fait accepter ces missions d’où tu peux ne jamais revenir ? demanda Alnaël en se coulant sur la couche de Blade.

Elle touchait Blade, l’avait contre lui et s’en amusait.

Elle connaissait son pouvoir et sentait vibrer Blade dès qu’il la frôlait.

— La grandeur de mon pays et de mon peuple, c’est justement d’avoir des hommes comme moi ! s’exclama Blade. Le jour où nous disparaîtrons, le pays sombrera. Il sera englouti définitivement !

— Je t’offre la possibilité d’être toujours ce que tu veux être, et de gouverner.

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