Les Rapaces by Thierry Brun

Les Rapaces by Thierry Brun

Auteur:Thierry Brun
La langue: fra
Format: epub
Tags: Roman
Éditeur: Le Passage
Publié: 2016-01-15T00:00:00+00:00


25.

En cette fin de journée, la terre accablée du Nivernais semblait se fissurer, se désagréger en poussière. Au loin flottait une brume qu’Armassant avait cherché en vain à immortaliser sur sa toile. S’occupant du barbecue auquel ses voisins l’avaient invité, il glissa une œillade vers son chevalet qu’il avait laissé là, quelques mètres plus loin, sur le chemin, en réprimant un soupir d’exaspération. Son œuvre lui paraissait terne et grossière. Les verts trop verts, les rouges trop rouges ne rendaient pas l’atmosphère pesante de la nature qui les environnait.

Il y eut un bruit de moteur. Englobant le paysage, son regard balaya à la dérobée les sentiers qui serpentaient entre les bois et la route qui filait vers le village. L’absence totale de vent laissait présager une nuit d’insomnie arrosée de vin léger.

Sous les parasols, Alexis Fredon, l’œil injecté de sang et le cheveu hirsute, versait l’anisette et le sirop d’orgeat. Les glaçons tintaient dans les verres et Isabelle Fredon remontait le bas de sa robe sur ses cuisses bronzées.

– Je vais chercher les merguez, dit-elle en se levant.

– Mais non, pas déjà ! Tu vois bien que les braises ne sont pas encore prêtes !

– Tu m’embêtes !

Alexis ricana pour masquer sa gêne.

– Nicolas, tu nous trouves pathétiques, non ? Tu ne veux pas t’occuper un peu d’elle ? Ça me ferait des vacances.

Isabelle éclata d’un rire sec.

– Eh bien si c’est ça, dit-elle, je te prends au mot, je vais rejoindre notre cher voisin !

Et s’approchant de Nicolas, elle lui demanda :

– Tu peins depuis quand ?

– Un petit moment.

– J’aime beaucoup ce que tu fais.

Il ne répondit rien. Elle se mordit les lèvres.

– Tu vis de quoi ?

– Mais c’est pas vrai ! Laisse-le tranquille, grinça Alexis. Tu le fais chier avec tes questions. Ça cogne encore, hein ?

– Décidément, je ne sais pas ce que t’as ce soir… Je ne peux rien faire, rien dire…

Isabelle fut interrompue par un bruit sourd. Le claquement d’une portière. Un jeune au front entaillé et à l’œil gonflé apparut en haut du raidillon. Il portait un tee-shirt Metallica, un short militaire et des tennis noires, et brandissait une batte de base-ball en marchant d’un bon pas.

– Je vais te massacrer ! lança-t-il à la cantonade.

Ses deux potes, costauds et en sueur, suivaient.

– Connard, c’est à toi que je parle ! continua le premier en désignant Fredon de son arme improvisée.

Puis, après avoir jeté un coup d’œil au chevalet, il dit à Armassant :

– Toi, l’artiste, tu ne bouges pas une oreille. C’est entre cet abruti et moi.

Isabelle, terrorisée, poussa un petit cri. Son mari, les sourcils froncés, regarda autour de lui et Nicolas s’inquiéta sur le champ en pensant que Fredon avait ses fusils à portée de main.

On pouvait voir que la blessure au front de Metallica était récente. L’œil torve, il serrait les dents et avançait.

– Tu vas morfler, sale con !

Alexis Fredon avait un sourire stupide au coin de la bouche.

– Mais qu’est-ce qui se passe ? bredouilla-t-il.

Le bras armé partit à la volée.



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