Les mémoires de maigret by Georges Simenon

Les mémoires de maigret by Georges Simenon

Auteur:Georges Simenon [Simenon, Georges]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Policier
ISBN: 9782253142126
Publié: 1951-01-16T23:00:00+00:00


***

Avec Jubert en moins boulevard Beaumarchais, les soirées du vendredi devenaient de plus en plus clairsemées et souvent, maintenant, il n’y avait personne pour tenir le piano. Dans ces occasions-là, c’était Louise qui jouait et moi qui tournais les pages pendant qu’un couple ou deux dansaient dans la salle à manger devenue trop grande.

Je ne crois pas avoir demandé à Louise si elle acceptait de m’épouser. La plupart du temps, nous parlions de ma carrière, de la police, du métier d’inspecteur.

Je lui dis combien je gagnerais quand je serais enfin nommé au quai des Orfèvres, ajoutant que cela prendrait encore au moins trois ans et que, jusque-là, mon traitement serait insuffisant pour entretenir dignement un ménage.

Je lui racontai aussi les deux ou trois entrevues que j’avais eues avec Xavier Guichard, déjà le grand patron, qui n’avait pas oublié mon père et m’avait plus ou moins pris sous sa protection.

— Je ne sais pas si vous aimez Paris. Car, vous comprenez, je serai obligé de passer toute ma vie à Paris.

— On peut y mener une existence aussi tranquille qu’en province, n’est-ce pas ?

Enfin, un vendredi, je ne trouvai aucun des invités, seulement Géraldine qui vint m’ouvrir elle-même la porte, vêtue de soie noire, et qui me dit avec une certaine solennité :

— Entrez !

Louise n’était pas dans le salon. Il n’y avait pas de plateau avec des gâteaux, pas de rafraîchissements. Le printemps était venu, et on ne voyait pas non plus de feu dans l’âtre. Il me semblait qu’il n’y avait rien à quoi me raccrocher et j’avais gardé mon chapeau à la main, gêné de mon habit, de mes escarpins vernis.

— Dites-moi, jeune homme, quelles sont vos intentions ?

Cela a probablement été un des moments les plus pénibles de ma vie. La voix me paraissait sèche, accusatrice. Je n’osais pas lever les yeux et ne voyais, sur le tapis à ramages, que le bord d’une robe noire, le bout d’une chaussure très pointue qui dépassait. Mes oreilles devinrent rouges.

— Je vous jure… balbutiai-je.

— Je ne vous demande pas de jurer. Je vous demande si vous avez l’intention de l’épouser.

Je la regardai enfin et je crois n’avoir jamais vu un visage de vieille femme exprimer autant d’affectueuse malice.

— Mais bien sûr !

Il paraît – on me l’a assez raconté par la suite – que je me levai comme un diable à ressort, que je répétai d’une voix plus forte :

— Bien sûr !

Que je criai presque, une troisième fois :

— Bien sûr, voyons !

Elle n’éleva même pas la voix pour appeler :

— Louise !

Et celle-ci, qui se tenait derrière une porte entr’ouverte, entra, toute gauche, aussi rouge que moi.

— Qu’est-ce que je t’avais dit ? prononça la tante.

— Pourquoi ? intervins-je. Elle ne le croyait pas ?

— Je n’étais pas sûre. C’est tante…

Passons, car je suis persuadé que la censure conjugale couperait le passage.

Le vieux Léonard, lui, je dois le dire, a montré moins d’enthousiasme et ne m’a jamais pardonné de ne pas appartenir aux Ponts et Chaussées. Très



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