Les lions diffamés by Pierre Naudin

Les lions diffamés by Pierre Naudin

Auteur:Pierre Naudin [Naudin, Pierre]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Historique, non lu
Publié: 2012-09-10T14:32:00+00:00


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Ce dimanche 14 août continua sans qu’aucun autre événement perturbât son cours monotone. La pluie ayant cessé, le baron de Rechignac passa l’après-midi sur ses murailles. Quand il se penchait à la fenêtre de sa chambre où il peignait, sur fond d’azur, les lions jaunes de son écu, Ogier, parfois, apercevait son oncle. Qu’il se tînt immobile ou qu’il arpentât le chemin de ronde, Guillaume dirigeait constamment ses yeux vers les lisières des forêts.

Vivien le rejoignit à plusieurs reprises. Ce furent des entretiens assez vifs, soulignés par des gesticulations du manchot, tandis que le baron, les mains réunies sur sa boucle de ceinture, haussait de temps en temps les épaules.

« Lequel est le plus soucieux ? s’interrogea le damoiseau en revenant à ses pinceaux. De quoi Podensac l’adjure-t-il ?… D’aller quérir sans tarder des hommes d’armes ? Même si cela lui coûte cher, il faut qu’il s’y résigne au plus tôt. »

Avant de grimper au faîte du donjon pour surveiller, lui aussi, la contrée, Blanquefort avait renforcé les guetteurs. Il y en avait sept, désormais – un pour chaque côté de cet heptagone irrégulier qu’était Rechignac –, l’arbalète ou l’arc à l’épaule. Devant les escaliers d’accès, leurs compagnons empilaient des quartiers et des boulets de pierre, tandis que Bressolles et Sicart de Lordat harcelaient les hommes de truelle et de marteau ; il fallait débarrasser les cours des matériaux et engins encombrants, de façon qu’en cas d’attaque aucun obstacle ne pût retarder les mouvements des défenseurs. Les femmes avaient disparu.

« Ont-elles déjà peur ? » se demandait Ogier.

Il eût aimé voir Anne. Il s’inquiétait du coup d’œil soucieux qu’elle lui avait lancé lorsqu’il écoutait Savignol. Que signifiait-il ? Allait-elle bientôt le rejoindre ?

À la fin du jour, agacé par sa solitude, il glissa son bouclier sous son lit ; et comme il s’apprêtait à se rendre au donjon pour souper, on frappa à sa porte. Saladin, allongé sous la fenêtre, aboya sans bouger.

— Tiens, c’est toi, Margot !

La chambrière avait un visage rond, des yeux bleus, une bouche étroite, un peu moqueuse. Le regard d’Ogier tomba sur sa gorge, qu’il vit presque tout entière tant était dénouée l’aiguillette à ferrets de cuivre qui fermait d’ordinaire le col de sa camisole.

— Que viens-tu m’annoncer ?

Il songea : « Elle est joliette, pas farouche… » Et ces seins blancs, à portée de ses mains, semblaient fermes, doux à souhait. Gilles Champartel, son époux, ne devait pas s’ennuyer.

— Anne m’a chargée de vous dire, messire, qu’elle ne pourra vous voir avant demain matin. Il a fallu qu’elle aille au hameau. J’en viens. Notre mère s’en va… Elle gonfle, gonfle et le souffle lui manque de plus en plus… J’aurais souhaité la veiller à la place de ma sœur, mais la damoiselle m’en a empêchée.

— Qui ? Tancrède ou Claresme ?

— Pas Claresme… L’autre !

Ainsi, à peine arrivée, Tancrède manifestait ses volontés.

— C’est dangereux de descendre au hameau… Sais-tu que les Anglais…

— Je sais, messire. Mais faut rien attendre des voisins et on ne peut la laisser seule… Anne remontera au petit matin.



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