Les femmes ne sont pas des anges by Cheyney Peter

Auteur:Cheyney, Peter [Peter, Cheyney]
La langue: fra
Format: epub
Publié: 2014-02-09T05:00:00+00:00

9. Thorensen se met à table

Dans mon temps, j’en ai fait de moches, des voyages en avion, mais le plus tarte de tous fut celui de Los Angeles. Le pilote était bon gars, mais, comme il a des embêtements avec sa femme, ça lui sape le moral. Chaque fois que je ferme les yeux pour essayer de dormir une minute, cet animal-là se met à me parler de la môme qu’il a épousée et de ce qu’il lui ferait s’il était sûr de ne pas être pris.

Il me dit aussi qu’il a de l’indigestion chronique et, quand je lui réponds que je ne crois pas qu’un gars puisse avoir deux pires choléras qu’une femme enquiquinante et une indigestion chronique, il me rétorque, et comment ! que si : on peut avoir par-dessus le marché un ongle incarné, et la preuve c’est qu’il l’a. Alors vous vous rendez compte que la balade n’aurait pas pu être plus guillerette.

On est arrivé au port aérien de Los Angeles à minuit, et, à minuit quinze, j’étais dans l’ascenseur de l’hôtel de Thorensen en train de grimper bavarder un peu avec lui, le mignonnet. Ma décision est à peu près arrêtée : en rentrant à San Francisco, je vais coffrer Bérénice sous l’inculpation d’assassinat, mais je considère tout de même que, sous ce rapport, pas mal dépend encore de ce que Thorensen va me dire.

Voyez vous-mêmes : si Thorensen et Bérénice s’aiment, il y a tout à parier qu’après son entretien avec Marella Bérénice va aller tout raconter à Thorensen. Quand elle m’a dit qu’elle était restée avec Marella de cinq à sept, j’ai trouvé ça long pour une engueulade de dames. Même entre femmes, une engueulade, ça se clôture en moins de deux heures.

Mon idée, c’est que, quand Bérénice a dit qu’elle était allée en auto voir des amis à droite et à gauche, elle était en réalité en grande discussion avec Thorensen à propos de ce qui s’est passé à la villa.

Je vais tâcher de profiter de ce que Thorensen a peur, pour lui soutirer une déposition. Vous vous êtes rendu compte que ce pantin-là n’est pas très crâne, ce qui est d’ailleurs l’une des raisons de son départ précipité de San Francisco. Je crois qu’il n’aimerait pas être impliqué dans un meurtre et que, quand il verra que je sais ce que je sais, il parlera avec effusion.

En arrivant, je le trouve debout en robe de chambre devant un radiateur électrique. Il a encore le front soucieux, mais pas autant que la dernière fois. Il a aussi l’air un peu vague, comme s’il avait pinté dur. Je crois que ce mec-là aime un peu trop la boisson.

— Comment ça va, Thorensen ? Désolé d’être obligé de vous déranger si tard, mais il y a une ou deux choses dont je veux parler avec vous.

— Bien sûr, il dit. Ne vous excusez pas. Vous avez votre travail à faire. Prenez un verre.

— Non, merci. Pas tout de suite.

Je jette mon pardessus et mon chapeau sur une chaise et je le regarde.

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