Les Femmes et la Révolution by Christine Le Bozec

Les Femmes et la Révolution by Christine Le Bozec

Auteur:Christine Le Bozec
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Humensis
Publié: 2019-07-15T00:00:00+00:00


Les autorités entre paradoxes et ambiguïtés

Il pourrait sembler à tout le moins paradoxal qu’après l’exclusion des femmes de la vie politique, le décret Bouquier rende obligatoire l’ouverture d’écoles mixtes en décembre 1793, résultat d’un ensemble de décrets votés par la Convention depuis octobre instaurant l’instruction publique primaire des garçons et des filles. Conséquence immédiate de cette mesure, la République eut rapidement besoin d’enseignants et les autorités décidèrent de recruter des institutrices. Ce métier, considéré comme émancipateur puisque garant d’une indépendance financière, fut promu et encouragé en France par une Anglaise, admiratrice de la Révolution française, Mary Wollstonecraft.

Installée à Paris en 1792, elle y passa trois années à prôner un enseignement public mixte, condamnant les pensionnats chics et les internats pour jeunes filles. Son combat pour l’égalité féminine, borné par son conservatisme social, accuse malgré tout quelques limites : en effet, son discours et ses écrits ne s’intéressaient qu’aux jeunes filles de sa classe sociale, expliquant que la patience et le temps feraient le reste pour les filles issues des classes défavorisées. Bien qu’équivoque en certains points, le décret Bouquier désirait quant à lui scolariser sans distinction tous les enfants.

Afin de pourvoir ces futurs postes d’enseignement, il était prévu de réunir des commissions de recrutement « composées d’hommes éclairés et recommandables par leur patriotisme et leurs bonnes mœurs » chargés de sélectionner des instituteurs et des institutrices « publiques et laïques » pour remplacer les religieux qui, même s’ils avaient prêté serment à la Nation, étaient écartés de leur fonction pédagogique.

C’est aussi à cette période que germa l’idée de créer une École nationale de la Maternité pour former les sages-femmes. Ouverte en 1795, la direction en fut confiée à Madame La Chapelle. Cette institution marchait sur les traces de la célèbre Madame Ducoudray qui, depuis 1759, avait instruit 5 000 jeunes filles au métier d’accoucheuse. Sous l’Ancien Régime, les sages-femmes, incorporées dans le corps des chirurgiens, avaient fait les frais de la rivalité qui opposaient ces derniers aux médecins. Les sages-femmes nouvellement formées exerçaient alors dans les villes, qui n’abritaient que 15 % de la population d’une France majoritairement rurale, où pratiquaient à l’inverse des matrones que les autorités désiraient soustraire à l’influence de l’Église.

Une autre ambiguïté de la politique en cours concerne les femmes soldats. En principe chassées de l’armée depuis 1793, on les y retrouve encore en 1799 et certaines femmes blessées pendant le combat suscitèrent parfois l’admiration des chefs pour leur courage. Malgré tout, le sentiment qu’il fallait être un homme pour porter les armes et que la bravoure ne pouvait être qu’une vertu masculine était lui aussi bel et bien présent. Le Recueil des actions héroïques et civiques, publié en 1794 par le Comité d’instruction publique, pris entre admiration et retenue, illustre bien ce paradoxe. Louant l’héroïsme de deux soldates pour s’être battues aux côtés de leur mari, l’article insistait surtout sur l’idée rassurante qu’après le combat, l’une et l’autre retourneraient à leur devoir de mère et d’épouse.

Ainsi, la Révolution ne semble pas avoir eu pour vocation



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