Les contes d'Amadou Koumba by Birago Diop

Les contes d'Amadou Koumba by Birago Diop

Auteur:Birago Diop [Diop, Birago]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Contes Populaires, Littérature Sénégalaise
Éditeur: Présence Africaine
Publié: 2011-12-19T23:00:00+00:00


LE SALAIRE

Diassigue-le-Caïman, raclant le sable de son ventre flasque, s’en retournait vers le Marigot après avoir dormi, la journée durant, au chaud soleil, lorsqu’il entendit les femmes qui revenaient de puiser de l’eau, de récurer les calebasses, de laver le linge. Ces femmes, qui avaient certainement plus abattu de besogne avec la langue qu’avec les mains, parlaient et parlaient encore. Elles disaient, en se lamentant, que la fille du roi était tombée dans l’eau et qu’elle s’était noyée, que fort probablement, c’était même certain (une esclave l’avait affirmé), dès l’aurore, Bour-le-Roi allait faire assécher le marigot pour retrouver le corps de sa fille bien-aimée. Diassigue, dont le trou, à flanc de marigot, se trouvait du côté du village, était revenu sur ses pas et s’en était allé loin à l’intérieur des terres dans la nuit noire. Le lendemain, on avait, en effet, asséché le marigot, et on avait, de plus, tué tous les caïmans qui l’habitaient ; et, dans le trou du plus vieux, on avait retrouvé le corps de la fille du roi.

Au milieu du jour, un enfant, qui allait chercher du bois mort, avait trouvé Diassigue-le-Caïman dans la brousse.

— Que fais-tu là, Diassigue ? s’enquit l’enfant.

— Je me suis perdu, répondit le Caïman. Veux-tu me porter chez moi, Goné ?

— Il n’y a plus de marigot, lui dit l’enfant.

— Porte-moi alors au fleuve, demanda Diassigue-le-Caïman.

Goné-l’enfant alla chercher une natte et des lianes, il enroula Diassigue dans la natte qu’il attacha avec les lianes, puis il la chargea sur sa tête, marcha jusqu’au soir et atteignit le fleuve. Arrivé au bord de l’eau, il déposa son fardeau, coupa les liens et déroula la natte. Diassigue lui dit alors :

— Goné, j’ai les membres tout engourdis de ce long voyage, veux-tu me mettre à l’eau, je te prie ?

Goné-l’enfant marcha dans l’eau jusqu’aux genoux et il allait déposer Diassigue quand celui-ci lui demanda :

— Va jusqu’à ce que l’eau t’atteigne la ceinture, car ici je ne pourrais pas très bien nager.

Goné s’exécuta et avança jusqu’à ce que l’eau lui fût autour de la taille.

— Va encore jusqu’à la poitrine, supplia le Caïman.

L’enfant alla jusqu’à ce que l’eau lui atteignît la poitrine.

— Tu peux bien arriver jusqu’aux épaules, maintenant.

Goné marcha jusqu’aux épaules, et Diassigue lui dit :

— Dépose-moi, maintenant.

Goné obéit ; il allait s’en retourner sur la rive, lorsque le caïman lui saisit le bras.

— Wouye yayô ! (O ma mère !) cria l’enfant, qu’est-ce que ceci ? Lâche-moi !

— Je ne te lâcherai pas, car j’ai très faim. Goné !

— Lâche-moi !

— Je ne te lâcherai pas, je n’ai rien mangé depuis deux jours et j’ai trop faim.

— Dis-moi, Diassigue, le prix d’une bonté, est-ce donc une méchanceté ou une bonté ?

— Une bonne action se paie par une méchanceté et non par une bonne action.

— Maintenant, c’est moi qui suis en ton pouvoir, mais cela n’est pas vrai, tu es le seul au monde certainement à l’affirmer.

— Ah ! tu le crois ?

— Eh bien ! Interrogeons les gens, nous saurons ce qu’ils diront.



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