Les brigands et la révolution (Champ Vallon, 18 février) by Sottocasa Valérie

Auteur:Sottocasa, Valérie [SOTTOCASA, Valérie]
La langue: fra
Format: epub
ISBN: 9791026700876
Éditeur: Editions Champ Vallon
Publié: 2016-03-13T16:00:00+00:00

Le corps de l’ennemi

Les actes de cruauté des brigands nourrissent l’insécurité et la peur. Il convient maintenant d’examiner leur réalité à travers les modes opératoires des bandes. La gamme de leurs brutalités est large : du vol au meurtre, ils exercent une pression forte sur les populations qui les craignent d’autant plus que le brigandage s’est considérablement développé au cours de la période révolutionnaire. Cette montée de la violence fait partie de la Révolution. Elle a contribué à façonner les esprits et a durablement marqué les mémoires, notamment à travers les épisodes de massacres et les vagues successives de Terreur et de Terreur blanche. Pour les époques plus récentes, des approches pluridisciplinaires ont été engagées sur ces questions afin de comprendre quelques-uns des épisodes les plus traumatisants du xxe siècle. Sociologues et politologues ont tenté de dresser le portrait des grands criminels contre l’humanité, de comprendre les comportements de ceux qui ont participé à des génocides et des massacres de masses643.. Dans quelle mesure les outils élaborés pour comprendre ces événements contemporains sont-ils adaptés aux violences de masse des périodes plus anciennes ? Ni les sociétés, ni les cadres de pensée, ni les moyens techniques ne sont les mêmes. Cependant, on peut penser la cruauté et la violence en dehors des seuls moyens utilisés pour les exercer. Anthropologues et sociologues présentent des réflexions sur des éléments constitutifs constants de la violence et certains ouvrages posent la question de la violence comme intemporelle – à l’exemple de Wolfgang Sofsky644. – mais d’autres ont une approche plus historique de la question, abordée de manière pluridisciplinaire. Les historiens ont toujours travaillé sur les temps de violences : guerres, coups d’État, révoltes et révolutions. Plus récemment, ils s’interrogent sur les caractères concrets de la violence en intégrant les approches sociologiques et anthropologiques. Pour la période révolutionnaire, on ne peut pas dire que les violences n’aient pas été étudiées puisque cette question a focalisé les attentions et les lectures antagonistes de la période. Cependant, une nouvelle approche s’élabore pour étudier la Vendée, les attentats, les massacres, la guerre ou la manière de la conduire645..

Nous avons cherché à comprendre en quoi consistaient précisément les violences exercées par les « brigands » sur les populations civiles, afin de saisir la nature des désordres, l’impact des brutalités sur les opinions et les sensibilités. L’intérêt de dénombrer gestes et actions violents ne relève pas d’une curiosité malsaine ou d’un goût pour le macabre mais d’un constat : en vidant les violences de leur contenu précis, en ne retenant des actes de brigandage que des traits généraux, les historiens des xixe et xxe siècles se sont coupés des réalités vécues par les contemporains, qu’ils ont édulcorées jusqu’à les dénaturer. De ce fait, les distinctions entre les différents types de brigandages sont gommées, voire niées. On évoque « le » brigandage comme on parle de « la » violence révolutionnaire. Mais de quoi s’agit-il ? Qui sont les violents ? Comment ont-ils exercé des pressions sur les populations et de quel

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