L'empire des damnés by Laurent Chabin

Auteur:Laurent Chabin [Chabin, Laurent]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Fantasy
ISBN: 9782894358801
Google: 23fVHgAACAAJ
Éditeur: Quintin Publishers/Editions Michel Quintin
Publié: 2015-10-11T04:00:00+00:00

Deux jours plus tard, j’étais habillée décemment, c’est-à-dire que je portais une longue jupe gris foncé recouverte d’un large tablier à peine plus clair, une blouse à manches longues et un foulard gris sur mes cheveux qui, depuis que Kollona s’y était attaquée, ressemblaient un peu moins à une crinière de fauve.

Kollona m’avait également maquillée, non pas pour me rendre plus attirante mais, au contraire, pour me vieillir un peu. En me regardant dans le miroir qu’elle avait apporté avec elle, j’avais cependant constaté, non sans une certaine fierté, que j’avais presque l’air d’une femme.

Ces deux jours de repos m’avaient rétablie et j’avais presque oublié les fatigues de la mine. Kollona m’avait fait porter un peu de viande et je crois que mon corps avait retrouvé tout le sang et l’énergie que lui avait soutirés Efi.

Tcherny ne m’avait encore confié aucune mission. Il sortait surtout la nuit, pour aller travailler dans une imprimerie clandestine. Le jour, il ne quittait pas la chambre. En revanche, il m’a envoyée au dehors à deux ou trois reprises pour acheter du pain ou d’autres denrées de première nécessité.

J’ai pu constater, chaque fois, l’agitation qui s’était emparée des rues de Vibor. Les Damnés allaient et venaient, échangeaient des nouvelles souvent contradictoires, montrant une nervosité à laquelle ils ne m’avaient pas habituée. Il était surtout question de la procession du lendemain, qui devait se rendre au palais impérial, de l’autre côté du fleuve.

La tension était extrême. Des bagarres avaient éclaté aux mines et aux forges de Putila entre les ouvriers et les contremaîtres, et on affirmait que des événements similaires s’étaient produits dans d’autres quartiers de la ville. Évidemment, je mourais d’envie de me joindre à cette procession, même si je n’y croyais pas plus que les Boleshs. Mais je me disais qu’une telle masse de gens en furie se dirigeant vers le palais du tyran serait certainement un spectacle à ne pas manquer.

De retour chez Tcherny, je lui ai demandé si, vraiment, aucun Bolesh n’allait assister à l’événement. Il a secoué la tête d’un air gêné.

— Bien sûr, je comprends la position d’Ulia, de Dzerji et des autres. Mais je crains aussi que, si nous ne nous montrons pas demain, nous ne perdions de notre crédit auprès de bon nombre de Damnés. Tôt ou tard, ils se rendront compte que Gapon les trompe, mais, à ce moment-là, il ne faudrait pas qu’ils nous aient oubliés. D’un autre côté, la procession sera infestée d’espions de l’empereur. Que je m’y montre et je serai aussitôt reconnu et arrêté. Depuis mon évasion, je ne peux plus apparaître en public.

Mes yeux ont pétillé de joie.

— Moi, personne ne me connaît, me suis-je exclamée avec enthousiasme. Et puis, qui se préoccupera d’une frêle jeune fille? J’irai et je te raconterai. L’information est la clé du pouvoir, m’as-tu dit. Alors je t’informerai.

— Il ne s’agit pas d’un jeu, Garance. Les Damnés ne porteront pas d’armes, ce sont les directives de Gapon. Mais les Atamans ne seront pas loin, le cortège sera truffé de provocateurs de tout poil et toute l’affaire risque de dégénérer.

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