Le Vagabond du roi by Michel Labonne

Le Vagabond du roi by Michel Labonne

Auteur:Michel Labonne
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: De Borée
Publié: 2020-08-12T16:00:00+00:00


Je sentis la douceur de sa peau, sur ma nuque et ma main, son parfum derrière moi. Je m’étais endormi sur les derniers détails de mon travail, et le chandelier semblait n’être qu’une sculpture de gel éteinte et froide, une ligne entière de mèches mortes. Elle écarta lentement l’encrier et rangea mes plans en soufflant doucement dessus. J’étais l’enfant qu’elle conduisait au lit, en m’aidant à me défaire de mon pourpoint, de mes chausses… J’aimais cette chaleur quasi maternelle, ces instants de caresses. Et je traînais sur mon ouvrage, soupirais parfois pour pouvoir les obtenir.

– Vous êtes épuisé, Sébastien. Laissez un temps votre travail, vous pourrez le reprendre demain.

– Vous lisiez tout à l’heure près de moi. Et quand je sens votre présence, j’oublie la fatigue et les heures qui passent.

– Venez maintenant vous coucher tout près, je ne suis heureuse que dans vos bras. Je veux vous sentir encore avant que la guerre ou quelque autre mission secrète ne vous éloigne de nouveau. Je vous sais très occupé, mais je veux profiter de chaque instant de votre présence, de chaque étape de notre voyage.

Je m’endormais heureux, apaisé et libre. Près de cette femme aimante dont je rêvais quand elle était loin. Que je pouvais embrasser, ressentir et toucher en tremblant. C’était la même présence de feu réel ou de mémoire. Elle faisait maintenant partie de mon passé, de mon âme, de mon tout. Elle était chair vivante dans mes pensées de pierres et d’angles, dans mon cœur de serviteur et de soldat.

Avant de quitter Bayonne, je tenais à me rendre dans les fermes de l’arrière-pays. C’était devenu une de mes habitudes lors de mes voyages dans les provinces. En plus de mes recensements, dénombrements, je tenais à me rendre compte par moi-même des conditions de vie du peuple. Je m’efforçais de repérer chaque détail qui puisse améliorer son quotidien. Catherine tint absolument à m’accompagner, je pris également un traducteur à l’aise avec le patois local. Un homme qui transmettait fidèlement toutes les paroles dans leurs subtilités. De même, dans la conversation, j’encourageais plusieurs fois les paysans à parler sans crainte et sans retenue. Je ne voulais passer à côté d’aucune difficulté, d’aucun tourment d’existence.

Nous visitâmes une fermette que je considérai ici comme un habitat moyen. Un couple de paysans à la vie difficile et leurs six enfants de trois à quinze ans. Ils étaient mal vêtus pour la saison, mieux tout de même que nos Morvandiaux. Je notai le nombre de leurs vêtements, de chemises, de chaussures, bien qu’ils aient surtout des sabots et que les enfants aillent le plus souvent pieds nus. Je les interrogeai sur leur alimentation : quantité de pain pour le père, puis celle des autres membres de la famille. Ici, ils complétaient avec des pois, des fèves, des vesces… La viande de bœuf était beaucoup trop chère dans cette province pour leur maigre condition. Ils consommaient parfois quelques débris d’agneau en soupe ou pour les jours gras. Le poisson du fleuve et de la mer les aidait en revanche beaucoup.



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