Le Gorille en fleurs by Antoine Dominique

Auteur:Antoine Dominique [Dominique, Antoine]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Policier, Littérature française, Espionnage
Éditeur: Gallimard - Série Noire
Publié: 1959-05-01T23:00:00+00:00

IX

Triviel debout, le front lourd d’attention, écoutait le récit mimé de Geo, poursuivant :

— … Évidemment, j’avais flairé le coup… mais j’ai fait poster Soufflant, à l’envers… si j’ose dire.

Il se rapprocha de Triviel faisant les gestes explicatifs.

— Soufflant posté dans le bâtiment à gauche du pont… là, il le descendait… Ah ! j’ai bien senti que la mère Bezouleh était à un doigt de me parler !… Tant pis !

Et le Gorille haussa les épaules, Triviel demanda :

— Vous êtes rentré quand ?

— Soufflant m’a ramené ici, au milieu de l’après-midi.

Triviel s’attrista :

— Et vous me prévenez maintenant seulement.

— Mais, lui retourna Geo, je ne savais pas si vous étiez là chez vous… Que diable, il vous arrive aussi de travailler dans la journée !

— J’espère, esquissa Triviel, que vous avez quand même prévenu la police locale ?

Geo hocha la tête :

— Ça, mon vieux, c’est votre truc !… Les poulets d’ici, je ne connais pas… Ce n’est pas moi le nouveau Lawrence ! C’est vous ! De toute façon, ils doivent le savoir, les poulets ! Au Liban tout le monde s’occupe de tout ! Ils sont pires qu’en France ! Jamais contents ! Contre tout ce qui est pour, pour ce qui est contre ! Alors vous parlez d’une occasion de dauber sur la police !

Triviel hocha la tête avec souci :

— C’est bien ce qui m’inquiète. Dans ces conditions on se demande quel bizarre résultat…

Et tout d’un coup, il décida :

— Faisons-la nous deux, cette enquête !

Geo se gratta la tête. Triviel enchaîna :

— Il ne faut pas que la mère Bezouleh, par exemple, raconte n’importe quelle folie… La police nous ignore, nous, barbouzes, mais encore faut-il que ça ne fasse pas de ressac !

Geo hésita une seconde, puis s’engagea résolument.

— Oui, dans le fond, pourquoi n’irait-on pas, vous et moi ?… Soufflant nous rejoindra plus tard, s’il le faut. Qui sait, il est peut-être resté là-bas, le tueur ?

Triviel ricana en citant :

— L’assassin revient toujours sur les lieux du crime.

Triviel s’était fait déposer à Gondas-ville, où il devait prendre contact avec la police locale pour amortir le coup.

Geo avait poursuivi seul, dans la voiture, jusqu’au moulin de Gondas.

Dix heures passées, un vent aigre compensait les effets d’un soleil dément. Un silence total sur la campagne ataupie. Le vieux du Kesrouan vint à la voiture de Geo et d’autorité, prit la valise, observant :

— Moi aussi, je suis assez fort pour la porter.

Puis il demanda :

— L’autre monsieur que nous attendons, n’est pas arrivé ?

— Plus tard.

Le vieux marchait devant Geo. Ils montèrent l’escalier de l’aile, sur le bief. Le vieux s’arrêta à mi-étage pour souffler, se tourna vers Geo.

— Heureusement que l’été vient, fit-il avec une certaine malice.

Geo ne comprit pas, mais approuva avec gravité.

C’était une très belle chambre en meubles provençaux, traînés ici par l’occupation française. D’ailleurs, le moulin était arrangé à « poutres apparentes », façon normande. En cherchant bien, on peut retrouver au Liban toutes les provinces de France.

Le vieux montagnard se gratta la joue faisant crisser les poils.

Télécharger

Déni de responsabilité:
Ce site ne stocke aucun fichier sur son serveur. Nous ne faisons qu'indexer et lier au contenu fourni par d'autres sites. Veuillez contacter les fournisseurs de contenu pour supprimer le contenu des droits d'auteur, le cas échéant, et nous envoyer un courrier électronique. Nous supprimerons immédiatement les liens ou contenus pertinents.