Le faux ami du capitaine Dreyfus - Picquart, l'affaire et ses mythes by Philippe Oriol

Le faux ami du capitaine Dreyfus - Picquart, l'affaire et ses mythes by Philippe Oriol

Auteur:Philippe Oriol [Oriol, Philippe]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Biographie historique, récit, Polémique
ISBN: 9782246860051
Éditeur: Grasset
Publié: 2019-10-22T22:00:00+00:00


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Lors de l’enquête du juge Fabre, instruction de la plainte de Cavaignac contre Picquart, et qui fut à nouveau un catalogue d’accusations portées par ses anciens subordonnés (Henry, Gribelin, Valdant, Iunck, Lauth), les concierges du ministère (Capiaux et Billet), Pellieux, et Gonse et Boisdeffre, Picquart se défendit enfin sans détour, sans atténuation, sans précaution. Il établit la « malveillance », les « équivoques », les « mensonges » de ses anciens subordonnés et chefs dans les témoignages qu’ils portaient contre lui et, en y adjoignant Du Paty, leur responsabilité dans toutes les machinations qui avaient été mises en place pour le perdre et pour sauver Esterhazy. Quant au dossier secret, s’il n’en disait pas plus, il reconnaissait pour la première fois qu’il en avait « entendu parler longuement en 1894169 ». Au terme de cette enquête, le réquisitoire du substitut Siben, qui requérait le renvoi en correctionnelle, fut entériné par le juge Fabre. Picquart avait cru devoir organiser une défense, y expliquait le substitut, qui n’avait aucune raison d’être et n’était que le résultat du trouble de son esprit, de son « idée fixe », de « son immense orgueil », de sa certitude « de détenir seul la vérité, d’être seul clairvoyant, intelligent, accessible aux sentiments de justice », de la « conviction erronée dont il ne pouvait s’affranchir » et « que ses chefs, mieux éclairés qu’il ne pouvait l’être, savaient pertinemment imaginaire » : « Il n’avait donc nullement à se préoccuper d’une défense, à raison d’inculpations dont il n’était pas menacé, et qui ne sont nées plus tard, précisément, que de ses indiscrétions et des manquements les plus graves à ses devoirs de soldat et de fonctionnaire, investi de secrets, que le souci de la défense du pays et la sûreté de l’État devaient lui interdire de révéler à tout autre qu’à ses chefs. »

Picquart, hors l’armée, en prison, attendait maintenant son procès qui devait se tenir le 23 septembre. C’est pour avoir dit que Dreyfus était innocent qu’il s’était trouvé dans cette situation. Pour l’avoir dit sans jamais avoir tenté de le montrer, sans jamais, par des scrupules qu’il jugeait peut-être maintenant excessifs, par naïveté aussi d’avoir cru aux promesses de ceux qui travaillaient à sa perte, exposer ce qu’il savait, tout ce qu’il savait. Maintenant, comme il l’avait fait avec le juge Fabre, il parlait. Ce faisant, il ne défendait pas tant l’innocence du reclus sur l’île du Diable que la sienne propre, ayant compris que son salut passait justement par la preuve de l’« erreur » de 1894. Ce sentiment, que nous imaginons en hypothèse parce qu’il est le bon sens, trouva, un peu moins de deux mois plus tard, une extraordinaire opportunité : Henry avoua à Cavaignac avoir fabriqué la lettre que Picquart qualifiait de faux depuis le procès Zola et fut retrouvé, le lendemain de son incarcération, allongé sur le sol de sa cellule, la gorge tranchée. La révision du procès Dreyfus devenant inévitable, Picquart, héros, en serait, pour Dreyfus et pour lui-même, le fer de lance.



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