Le dernier des nôtres by Clermont-Tonnerre Adélaïde de

Le dernier des nôtres by Clermont-Tonnerre Adélaïde de

Auteur:Clermont-Tonnerre, Adélaïde de
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Grasset
Publié: 2016-08-17T00:00:00+00:00


Manhattan, 1971

Lauren, Marcus et moi étions inquiets. En trois jours, Rebecca ne s’était pas réveillée plus de quatre heures, chaque fois en mon absence. Seule Lauren avait échangé quelques mots avec elle. Même debout, Rebecca semblait ailleurs. Ma sœur avait essayé de lui parler, de mettre des musiques joyeuses en lui faisant respirer des huiles essentielles tonifiantes de noix de muscade, de citron et de pin sylvestre. Elle avait même installé un brûleur dans un coin de ma chambre pour diffuser ces essences en continu, sans autre résultat que de me faire éternuer compulsivement et de brûler quelques poils du derrière de Shakespeare qui s’assit dessus par mégarde. Au soir du quatrième jour, je secouai gentiment Rebecca. Ma beauté marmonna qu’elle voulait dormir et qu’on la laisse en paix. Comme j’insistais, elle devint agressive, rugit comme un félin et battit l’air de ses mains pour chasser les miennes. Quand je la soulevai pour la mettre debout de force, elle me mordit férocement. De surprise, je la lâchai. Marcus et Lauren m’entendirent claquer la porte de la chambre en faisant trembler tout l’étage. Je fis irruption dans la cuisine et exigeai que ma sœur me désinfecte.

« Ce n’est pas grave, tu auras un hématome, rien de plus », décréta Lauren.

Cette indifférence à ma blessure ne m’empêcha pas de vider le bac à glace du réfrigérateur dans un bruit de tonnerre. Je fis tomber la moitié des glaçons par terre ainsi que toute la pile de torchons pour me confectionner un brassard disproportionné, avant d’aller agoniser sur le canapé du salon. J’en avais assez de la façon dont Rebecca m’ignorait. Depuis quatre jours, elle se servait de moi comme d’une bouillotte, glissant, au besoin, ses mains et ses pieds glacés sous mon ventre ou mes fesses, et me repoussant dès que je l’avais réchauffée. Lauren jeta un œil dans ma chambre. La mine bienheureuse, Rebecca était à nouveau profondément assoupie à côté de Shakespeare qui s’installait près d’elle dès que je tournais les talons. Elle avait le culot de me remplacer par mon chien ! Je fus d’autant plus contrarié que le canapé était trop court pour moi. Je passai une nuit détestable à refaire notre histoire dans tous les sens possibles et à manigancer ma vengeance contre les Lynch et leur fille. Le lendemain, rien n’avait changé.

« C’est la belle au bois dormant ! conclut Marcus, lorsque nous nous retrouvâmes tous les trois face au lit où s’étalait toujours Rebecca. Tu as essayé de l’embrasser ?

— Vu comme elle mord, je ne vais pas m’y risquer, grognai-je. Elle pourrait bien me couper la langue.

— Tant que ce n’est que la langue… plaisanta Lauren qui s’attira nos regards scandalisés. Les garçons, vous n’avez aucun humour », soupira-t-elle.

Nous partîmes travailler. Nous préparions une offre d’achat pour trois nouveaux terrains à lotir. Notre équipe avait planché sur le budget et le projet de développement. Les différents architectes que nous avions mis en compétition devaient nous présenter leurs projets. Nous passâmes notre journée en réunion et lorsque nous rentrâmes à la maison, la situation n’avait pas évolué.



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