Le courage d'une mère by Picat Marie-Laure

Auteur:Picat, Marie-Laure [Picat, Marie-Laure]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Témoignage
ISBN: 9782915056839
Éditeur: Oh ! Éditions
Publié: 2009-03-11T23:00:00+00:00

12

Maman à mi-temps

— Tiens, tu vois, eux, c’est les gens chez qui je vivrai quand maman sera morte.

C’était un soir de novembre. L’agrément n’avait pas encore été donné. Les Piniès, qui avaient pris l’habitude de passer prendre un café à la maison pour que les enfants s’habituent à leur présence, venaient de débouler chez moi. Les enfants étaient venus dire bonjour. Parmi eux, il y avait un copain de Julie. Matthieu s’est tourné vers lui pour faire ces drôles de présentations, le plus naturellement du monde. Valérie est restée bouche bée. Jean-Marc ne savait pas s’il fallait en rire ou s’il fallait intervenir. Finalement, c’est Valérie qui a pris la parole :

— Attends, mon bout’chou, je te rappelle que ce n’est pas encore fait.

— Oui, oui, je sais.

Valérie et Jean-Marc étaient très mal à l’aise : voir un petit garçon de cinq ans parler de ces choses-là avec ce ton si détaché, en ayant l’air de trouver la situation tout à fait normale, ça fait un peu peur. Heureusement, les Piniès ont très bien compris que ce calme apparent cachait un grand trouble. Pour mes trois aînés, ce qui allait advenir d’eux après ma disparition était encore très abstrait. Je crois d’ailleurs qu’ils n’en ont jamais parlé entre eux, comme si le sujet était un peu tabou. Il nous a semblé important, avec les Piniès, que les enfants commencent à se faire une idée de leur future existence le plus rapidement possible. Pour que la transition se fasse en douceur. Nous avons donc décidé de faire un petit essai, le temps d’un week-end.

— Les enfants, ça vous dit d’aller passer le weekend chez Valérie et Jean-Marc ?

— Pour quoi faire ?

— Pour que vous fassiez connaissance, que vous voyiez où vous allez grandir. Vous n’avez pas envie de voir vos chambres ?

— Si !

C’est Matthieu qui avait répondu avec autant d’enthousiasme. Il n’est pas compliqué, mon fils cadet, il suit le mouvement : un peu turbulent, certes, mais docile. Si on lui dit « tu vas dormir chez Cécile », on n’a même pas fini la phrase qu’il est déjà parti chercher ses affaires. En même temps, c’est un solitaire, qui aime jouer dans son coin et s’inventer des histoires avec ses tracteurs : il peut jouer trois ou quatre heures d’affilée avec ses Lego ou ses Playmobil. Il adore qu’on lui lise des livres aussi. Il est dans son monde et il intériorise beaucoup. Julie a réagi plus mollement à l’idée du weekend, mais elle ne s’y est pas opposée : elle savait que c’était pour leur bien. En fait, c’était la réaction de Thibault que je craignais le plus. Mon grand garçon a du mal à se détacher de moi et sa sensibilité est plus à vif que celle de ses frère et sœurs. Il va bien dormir de temps en temps chez son copain Steven, pourtant, la plupart du temps, il préfère rester à la maison. C’est un tendre, mais aussi un angoissé, qui exprime tout ce qu’il ressent : ça a ses bons et ses mauvais côtés.

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