Le chevalier d'eon by Evelyne Lever

Le chevalier d'eon by Evelyne Lever

Auteur:Evelyne Lever [Lever, Evelyne]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Histoire
Publié: 2010-12-17T23:00:00+00:00


Les désarrois d’une « fille extravagante »

Dans sa réponse, datée du 18 janvier{183}, Beaumarchais réfute point par point les prétentions de « sa tendre et fidèle amie » ; il lui reproche d’avoir conservé indûment des papiers secrets, de l’avoir escroqué de cent vingt mille livres, et la menace de faire opposition sur sa rente viagère auprès du Parlement. Et il ajoute : « Si j’envoyais votre misérable lettre en France, elle n’affligerait que vos amis ; tous vos adversaires en triompheraient justement. La voilà, diraient-ils, telle que nous l’avons toujours dépeinte. Ce n’est plus contre ses prétendus ennemis qu’elle exerce aujourd’hui ses folles et détestables ruses ; c’est contre son seul ami, celui qu’elle a nommé son appui, son libérateur et son père ! La voilà ! »

Mais d’Éon ne se tient pas pour battu. Aussitôt, il reprend la plume qu’il trempe cette fois dans le fiel, pour réclamer à nouveau son dû. Qu’on applique les clauses de la transaction ! qu’on lui paie ces « fortes sommes » qu’il attend toujours ! qu’on tienne parole, et il tiendra la sienne ! Cette longue lettre à Beaumarchais marque un changement de ton ; chaque mot tend à culpabiliser l’adversaire, à le faire rougir de sa goujaterie, à le faire tomber dans le piège du remords. D’Éon se prend au jeu de la femme sans défense. On sent percer, sans que l’auteur ose se l’avouer à lui-même, la plainte inconsolable d’une victime sans bourreau, et qui s’en invente un pour justifier ses pleurs. Mieux peut-être que tout autre écrit de la chevalière (et Dieu sait qu’ils sont nombreux), celui-ci nous paraît lever un pan du voile sur le mystère de sa nature. Il a beau s’emmêler dans l’emploi du masculin et du féminin (signe évident de son désarroi), une chose éclate aux yeux du lecteur : si la main qui tient la plume est celle d’un homme, la sensibilité qui la guide appartient à une femme. Ces pages frémissantes en disent plus long, à cet égard, que ne le faisaient naguère ses enjôlements de courtisane.

«Pourquoi, lui écrit-elle (et ce féminin n’a jamais mieux convenu qu’ici), pourquoi, pendant votre dernier voyage à Londres, y avez-vous gagné une maladie vénérienne qui a été connue de tout Paris, tandis que, pour vous amuser sans doute à mes dépens, ou pour me rendre ridicule, vous faisiez entendre dans les cercles de vos élégantes que vous deviez m’épouser après que j’aurais demeuré quelques mois à l’abbaye de Saint-Antoine ? [...] Mais quel souvenir me rappellent ces réflexions ! Il me dit seulement que par une confiance aveugle en vous et en vos promesses, je vous ai découvert le mystère de mon sexe, que par reconnaissance je vous ai donné mon portrait, et que par estime vous m’avez promis le vôtre. Il n’y a jamais eu d’autres engagements entre nous. Tout ce que vous avez avancé au-delà sur notre mariage, suivant ce que l’on m’a écrit de Paris, ne peut être regardé par moi que comme un véritable persiflage de votre part.



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