Le Bathory by Benoit Herbet

Le Bathory by Benoit Herbet

Auteur:Benoit Herbet [Herbet, Benoit]
La langue: fra
Format: epub
Tags: thriller
Éditeur: Ex Aequo
Publié: 2018-05-01T22:00:00+00:00


XXXII

Le soir, à Charleroi, les magasins fermaient à dix-huit heures. À ce moment, la ville se vidait. D’autant plus rapidement qu’on était en octobre. Il faisait nuit. Les gens semblaient pressés de rentrer chez eux, et de s’y calfeutrer. Le parking de l’innovation bavait ses dernières voitures, et rue de Dampremy, les piétons fondaient sous les structures suspendues.

Les cinémas, à chaque fin de séance, vers vingt heures et vingt-deux heures, expulsaient leurs derniers spectateurs qui, eux aussi, étaient parfaitement solubles dans l’obscurité. Je parle ici des vrais cinémas, pas du Bathory, qui était un cas à part. Je parle du Trianon, du Paris, du Coliseum, du Marignan et du Vauban.

Alors, une atmosphère vénéneuse s’emparait des rues. À la misère se superposait le danger. À Charleroi, la nuit venue, aucune vie sociale ne s’affichait, aucune promenade ne se parait de décence. Les derniers feux qui brillaient à la Ville Haute, Place du Manège, ou à la Ville Basse, rue du Moulin et rue de Marchienne, rougeoyaient dans l’âtre des carrées{25} faméliques ou à la lueur de phares surgis du néant et en route pour l’oubli. Nul ne sortait plus par hasard. Les noctambules étaient soit des êtres à la vie brisée rejetés dans des rues aussi désespérées que leur propre existence, soit des individus dont les quêtes honteuses se devinaient à leurs mines concupiscentes, dépravées ou vindicatives.

Le Parc Reine Astrid était probablement l’endroit le plus dangereux d’une cité qui n’en manquait pourtant pas. Les hommes s’y louaient et s’y vendaient, s’y aventuraient et s’y perdaient.

Je fis une première fois le tour du Parc. Sur cinq réverbères, je trouvai sans peine autant d’autocollants. Nulle trace d’Estelle, certes, mais des messages néo-nazis similaires à ceux que j’ai déjà décrits plus haut. Je les arrachai tous.

Je me demandais combien de temps il faudrait pour qu’ils réapparaissent.

Je décidai d’attendre.

Dans un premier temps, je me contentai de faire le tour du parc, en repérant le manège des voitures qui maraudaient inlassablement. Je me rappelle avoir revu le gars dans la Toyota et qui avait posé une couverture sur son hayon arrière. Il était probablement passé une dizaine de fois au cours de la soirée. Il avait ralenti à ma hauteur, et m’avait regardé avec insistance.

Ne me demandez pas pourquoi, mais à un moment, j’ai pensé qu’il serait plus discret, ou plus sûr, de me dissimuler dans les feuillages du parc. C’était stupide, je le savais, mais j’étais capable, que je le veuille ou non, d’être totalement débile.

Je suis donc entré dans le parc, côté Boulevard de Fontaine, non loin de la stèle en hommage au pigeon soldat. Ses allées étaient parfaitement désertes. Ses buissons aussi. En apparence.

J’ai repéré un nouvel autocollant sur un lampadaire éteint.

« Pendez Mandela ! » L’incantation m’était familière. Je l’arrachai aussitôt, moins pour accomplir une bonne action que pour m’accrocher à mon plan précaire.

C’est à ce moment que j’entendis distinctement des pas derrière moi.

Je me retournai, de crainte de voir deux hommes surgir d’un talus.

De fait, je vis deux hommes surgir d’un talus.



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