L'Attente était si longue by Maura McGiveny

L'Attente était si longue by Maura McGiveny

Auteur:Maura McGiveny [McGiveny, Maura]
La langue: fra
Format: epub
ISBN: 9782280004350
Éditeur: Harlequin
Publié: 1987-01-01T23:00:00+00:00


06

Le dégoût et l'aversion qu'elle perçut dans la voix de Ben, pétrifièrent Danielle autant que l'annonce de cette terrible nouvelle. La honte, l'embarras, la stupeur se la partageaient. L'espace d'un instant, tout éclat de vie sembla avoir déserté son visage. Elle se cramponna à un vague sursaut d'indignation douloureuse.

— C'est bien ce que je pensais, murmura-t-elle.

Elle accusait directement Ben de duplicité, de calcul. Il ne broncha pas, mais ses yeux se fermèrent, ses traits se déformèrent sous le coup d'une étrange déchirure. Ses lèvres tremblaient violemment. Il se détourna, comme s'il tentait de se cacher de Danielle.

— Pardonne-moi, Ben, souffla-t-elle aussitôt, honteuse de sa franchise égoïste. Je... J'ignorais pour Libby.

— Vraiment? fit-il en revenant à elle. C'était écrit dans tous les journaux.

Son incrédulité hautaine eut le don de la révolter.

— Je n'ai pas l'habitude de lire le carnet mondain !

Là encore, elle regretta très vite. Ben avait poussé une exclamation peinée, douloureuse. Il ne méritait pas sa cruauté.

— Pardon! Pardon! répéta-t-elle. Je dis n'importe quoi.

Instinctivement, elle se rapprocha de lui, posa une main sur son bras. Le recul de Ben acheva de la blesser mais une importante question lui brûlait les lèvres.

— Que s'est-il passé? Etait-elle malade? S'agit-il d'un accident ?

Une lueur qui ressemblait à de l'espoir traversa furtivement les prunelles de Ben.

— Tu n'étais vraiment pas au courant ? Elle a succombé à la naissance de Christopher.

— Christopher?

— Mon fils, répondit-il d'une voix blanche.

La stupeur de Danielle ne connut plus de bornes.

— Mais j'étais avec toi ce jour-là, à l'hôpital. Le médecin est venu te dire qu'elle allait bien !

Ben se taisait. Il dévisagea la jeune femme avec une expression de tristesse, mêlée de honte et d'angoisse.

— Je l'ai cru moi aussi, mais tu sais comment sont les médecins. Ils n'annoncent jamais franchement les drames. Il s'est contenté de faire entendre qu'elle l'avait échappée belle. En réalité, elle était dans le coma ; elle n'a pas repris conscience. Il a dit qu'elle souhaitait me voir parce qu'elle était perdue ; il le savait déjà. Quand je suis arrivé à son chevet, elle était morte.

Sa voix se brisa. Il enfouit son visage dans ses mains, trahissant son tourment.

Danielle ne sut trouver les mots qui l'auraient réconforté. Aucune parole ne lui semblait adéquate. Assise près de Ben, elle le sentit trembler violemment. Il recommença à parler d'un ton saccadé, empreint de peine.

— Ma femme se mourait et j'étais avec toi. Je m'en souviens, je te tenais même la main.

Il devint difficilement audible.

— Cette alliance d'or à ton annulaire gauche... Je n'avais qu'une obsession, qu'une seule idée en tête : tu étais mariée... Tu appartenais à un autre homme. Tu en aimais un autre. Pas moi.

Il releva lentement la tête. Il pleurait.

— Ma femme mourait et je ne pensais qu'à toi, je ne voyais que toi !

Vert et or, leurs regards s'accrochèrent, se fondirent, et Danielle comprit.

Ben n'avait cessé de l'aimer, jusqu'à ce soir fatal à l'hôpital. A présent, il la haïssait. Dans son trouble, il l'accusait indirectement de la mort de son épouse.



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