La terre en feu by Bernard Cornwell

Auteur:Bernard Cornwell [Cornwell, Bernard]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Novela, Aventuras, Histórico, Bélico
Éditeur: ePubLibre
Publié: 2009-03-15T00:00:00+00:00

* * *

Rien de grandiose ne peut se faire sans risque, mais il arrive parfois que je repense à ces journées et je suis stupéfait des risques que nous avons courus en Frise. Ce fut, à une moindre échelle, comme quand nous avions attiré Harald à Fearnhamme, car de nouveau je divisai mes forces, et, cette fois encore, je risquai tout en misant sur le fait que mon ennemi ferait exactement ce que j’escomptais. Et cette fois encore, l’appât fut Skade.

Elle était belle. C’était une beauté sombre et sinueuse. La regarder, c’était la vouloir, la connaître, c’était se méfier d’elle, mais la méfiance était toujours vaincue par cette extraordinaire beauté. Elle avait de hautes pommettes, une peau lisse, de grands yeux et des lèvres pleines. Ses cheveux étaient noirs et brillants, son corps langoureux. Bien sûr, maintes femmes sont belles, mais la vie est dure pour une femme. Les grossesses dévastent leur corps comme tempêtes, et le travail continuel, entre grain à piler et laine à filer, laisse son empreinte sur la beauté de la jeunesse, mais Skade, qui avait pourtant vécu plus de vingt ans, l’avait gardée intacte. Et elle le savait, et elle comptait pour elle, car elle lui avait permis d’aller de la masure d’une veuve aux grandes tables des salles de banquet. Elle aimait dire qu’elle avait été vendue à Skirnir, mais en vérité, elle l’avait accueilli volontiers, puis avait été déçue, car, malgré tout le trésor qu’il avait amassé, il n’avait aucune ambition au-delà des îles de la Frise. Il avait trouvé un endroit bien pourvu pour la piraterie, et puisqu’il ne voyait aucun intérêt à voguer au loin pour en trouver un mieux pourvu encore, Skade avait trouvé Harald, qui lui avait promis le Wessex, et à présent, c’est moi qu’elle avait trouvé.

— Elle se sert de toi, m’avait dit Brida à Dunholm.

— Je me sers d’elle, avais-je répondu.

— Il y a ici des dizaines de putains qui sont bien meilleur marché, avait rétorqué Brida avec mépris.

Or donc, Skade se servait de moi, mais pour quoi ? Elle réclamait la moitié du trésor de son époux, mais qu’en ferait-elle ? Quand je lui demandai, elle haussa les épaules comme si la question n’avait aucune importance, mais tard cette nuit-là, avant qu’Osferth feigne sa trahison, elle me parla. Pourquoi voulais-je l’argent de son époux ?

— Tu le sais.

— Pour reprendre ta forteresse ?

— Oui.

Elle resta un moment sans mot dire. L’eau clapotait le long des virures du Seolferwulf. J’entendais mes hommes ronfler, les pas traînants des sentinelles à la proue et au-dessus de nous sur le pont de gouverne.

— Et ensuite ?

— Je serai seigneur de Bebbanburg, répondis-je.

— Comme Skirnir l’est de Zegge ?

— À une époque, dis-je, les seigneurs de Bebbanburg régnaient loin jusqu’au nord et tout au sud jusqu’à l’Humber.

— Ils régnaient sur la Northumbrie ?

— Oui.

Elle m’ensorcelait. Mes ancêtres n’avaient jamais régné sur la Northumbrie, tout au plus sur la partie nord de ce royaume quand il était divisé entre deux trônes, mais je déposais à ses pieds un tribut imaginaire.

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