La République des traîtres (Texto) (French Edition) by Garrigues Jean

La République des traîtres (Texto) (French Edition) by Garrigues Jean

Auteur:Garrigues, Jean [Garrigues, Jean]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Tallandier
Publié: 2020-03-04T16:00:00+00:00


« Tu es doué pour la politique »

Leur première rencontre remonte donc au mois de juin 1975, à Nice. Elle tient presque du coup de foudre réciproque. Jacques Chirac a quarante-trois ans et il est Premier ministre ; Nicolas Sarkozy, tout juste vingt ans, est l’un des animateurs du mouvement de jeunes de l’UDR. Les assises du parti sont réunies pour deux jours au palais des congrès de la ville. Le dimanche 15 juin au matin, le jeune Nicolas Sarkozy doit prononcer une brève allocution qu’il a soigneusement préparée au cours de la nuit précédente. Tremblant, intimidé, mais déjà surexcité par la soif de gloire et l’attrait des sunlights , il patiente quelques minutes derrière la tribune. Jacques Chirac déboule à grandes enjambées. Le jeune Sarkozy l’observe, subjugué par son énergie et son charisme. Chirac doit distribuer la parole aux intervenants qui se succèdent. Il sort une petite fiche cartonnée de sa poche et se tourne vers le jeune homme : « Sarkozy, c’est toi ?

– Oui.

– Écoute, moi, je te donne la parole deux minutes, au bout de deux minutes, je te coupe le micro. T’as compris, mon petit ? » Le jeune homme acquiesce et Jacques Chirac lance à la foule : « La parole est à Nicolas Sarkozy. » L’intéressé s’avance à la tribune et prononce ses premiers mots en public, aveuglé par les projecteurs. Il dépasse allègrement son temps de parole, squatte le micro pendant près d’un quart d’heure et lâche au passage sa première apostrophe restée célèbre : « Être gaulliste, c’est être révolutionnaire ! »

Jacques Chirac déguste, en connaisseur, le numéro du jeune homme. Il est étonné par son culot. Il contemple, ébahi, le tableau que lui offre la tribune et croit percevoir comme un portrait de Dorian Gray. Le miroir lui renvoie l’image d’un double, une sorte de petit frère qui serait aussi un jumeau. Il croit se revoir près de dix ans plus tôt lorsque, jeune loup aux dents longues et déjà aiguisées, il avait été envoyé par Georges Pompidou avec quelques-uns de ses semblables à l’assaut de terres rurales corréziennes détenues par la gauche.

« En juillet 1975, pour la première fois, Jacques Chirac m’a reçu en tête-à-tête. Il m’a dit : “Tu es doué pour la politique. Viens avec moi3 ” », a raconté Sarkozy pour résumer la rencontre. Une version corroborée par le récit de Jacques Chirac : « Je l’avais remarqué à l’occasion d’un de nos meetings, au milieu des années soixante-dix. Ayant demandé à prendre la parole pendant quelques minutes, en tant que délégué départemental des jeunes gaullistes des Hauts-de-Seine, il s’était exprimé avec brio pendant plus d’un quart d’heure. Il avait à peine vingt ans et faisait preuve d’un tempérament politique prometteur. Je lui demandai de venir travailler à mes côtés, ce qu’il fit aussitôt, prenant part efficacement à toutes mes campagnes, avec cette volonté qui ne l’a pas quitté, de se rendre indispensable, d’être toujours là, nerveux, empressé, avide d’agir et se distinguant par un sens indéniable de la communication4 .



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