La peur blanche by Seeley Clinton

Auteur:Seeley,Clinton [Seeley,Clinton]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Série Noire [0263]
Éditeur: Gallimard
Publié: 2017-01-12T00:00:00+00:00

CHAPITRE XI

Je regardais par la fenêtre, quand j’ai vu la montagne devenir d’un seul coup toute rouge et dorée. La tempête était passée et le soleil en se couchant éclaboussait tout le pic de lumière. Je me suis levé pour mieux voir. Il y avait des congères amoncelées partout, mais le vent était tombé. Et des taches de bleu se montraient dans le ciel. C’était tellement beau, le soleil qui faisait briller la neige comme de l’or, que je n’arrivais pas à m’ôter de là.

Et puis, j’ai pensé à mon ouvrage. Il était grand temps que je m’y mette. Ma figure me piquait encore et mon nez me faisait mal, mais sans doute que ça se passerait à l’air.

J’avais dans l’idée d’aller tout seul dans l’étable prendre le revolver dans la boîte à gants de leur auto. Mais ça ne s’est pas du tout passé comme ça. Benjie m’a suivi, comme s’il avait pu lire ce que j’avais en tête et il est allé tout droit prendre lui-même le revolver. Il était plus malin que je ne l’avais supposé, Benjie. J’ai fait mon ouvrage et lui est resté à me surveiller, tout le temps, sans dire un mot. Après quoi, on est rentrés dans la maison.

Edna essayait de faire à souper. Elle n’arrêtait pas de courir dans le living-room pour demander à maman où se trouvaient les choses. Elle a dit à mon oncle Charlie de changer le linge sur la tête de maman. Jusque-là, elle n’avait pas beaucoup parlé, mais une fois lancée, on aurait dit qu’elle ne pouvait plus s’arrêter. On n’entendait qu’elle. Elle m’a dit de venir l’aider à la cuisine. Benjie se tenait assis sur la table et se moquait d’Edna parce qu’elle se mêlait de faire la cuisine, et des plaisanteries de ce genre. Elle n’avait pas l’air de se soucier de lui. C’était assez rigolo dans la cuisine, avec Edna. Les autres avaient tous l’air sinistre.

A la radio, on a redonné les informations. Benjie et mon oncle Charlie sont allés écouter. Moi, ça ne m’intéressait pas, ce qu’ils avaient à dire sur le cambriolage de la banque ou le dégagement des routes. Ils répètent toujours les mêmes trucs à la radio.

Le souper n’était pas très bon – pas comme maman l’aurait préparé. Tout le monde a mangé sans dire un mot. Papa est même venu s’asseoir avec nous. J’ai bien vu qu’il était salement malade. Il n’a presque pas mangé et puis son visage était tout drôle. A un moment, il s’est mis à tousser et son mouchoir s’est couvert de sang. Quand il est retourné à sa chambre, j’avais de la peine pour lui. Le docteur lui disait toujours d’aller dans un sana, mais il ne voulait pas. Maman aussi avait essayé de le faire partir, mais elle ne réussissait qu’à le mettre en colère. Il disait qu’il ne voulait pas mourir comme un indigent, alors maman a finalement laissé tomber la question.

Après souper, tout le monde s’est trouvé réuni dans le living-room, sauf papa.

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