La Fille au cœur de dragon by Stephanie Burgis

Auteur:Stephanie Burgis [Burgis, Stephanie]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Gallimard Jeunesse
Publié: 2019-07-10T13:20:13+00:00

CHAPITRE 16

– Ouille !

J’ai atterri lourdement sur mon coude et me suis à moitié étalée sur l’intrus qui m’attendait là.

Il s’est tortillé sous moi et j’ai bondi en arrière, essayant de me mettre en sécurité…

Mais la porte se refermait déjà derrière moi, me piégeant dans les ténèbres du passage réservé aux domestiques. Un grondement rauque s’est élevé dans l’air à l’odeur de renfermé et j’ai reculé précipitamment.

Qu’est-ce que les fées avaient bien pu emmener d’autre avec elles ?

– Tu n’aurais pas pu frapper d’abord ? a rugi Aventurine.

– Oooh !

Je me suis laissée tomber sur elle, toute molle de soulagement. Mon cœur tambourinait toujours dans ma poitrine, comme si je venais de piquer un sprint à travers tout le premier arrondissement.

– Qu’est-ce que tu fabriques ici, espèce d’idiote ?

– Qu’est-ce que tu crois ? a-t-elle demandé en bâillant, avant de se dégager et de s’asseoir. Je veille sur toi, bien sûr.

J’ai secoué la tête, ébahie, et j’ai ramené mes genoux contre ma poitrine.

– Sur moi ? C’est toi le dragon, je te rappelle. C’est toi que ces fées veulent capturer, pas moi.

– Pfff ! Je t’ai déjà dit que je mangerais toutes les fées qui essaieraient.

– Et moi, je t’ai dit… !

Non. J’ai serré les lèvres pour retenir la réponse furieuse que j’avais envie de cracher. Il me restait trop peu de temps pour perdre de l’énergie.

– D’ailleurs, ai-je repris, tu n’es pas censée dormir dans la cuisine à chocolat pendant ton séjour ?

– La cuisine se porte très bien. Et contrairement à toi, elle ne va nulle part. Je savais que tu ferais quelque chose de ridicule comme rôder en pleine nuit sans personne pour te protéger. (Elle a soupiré avec une condescendance exaspérante.) Tu te comportes peut-être comme un dragon de temps en temps, mais tu n’as pas de griffes ni de crocs, tu sais.

J’ai retroussé les lèvres.

– Tu crois ça ?

– Pas de vrais crocs, a-t-elle répondu d’un ton neutre. Alors, il faut bien que quelqu’un veille sur toi.

C’en était trop. Je me suis mise à rire. Mais quand j’ai posé la tête sur mes genoux, mon rire a tremblé dangereusement. J’ai dû cligner plusieurs fois des yeux pour en chasser le picotement et ravaler tout ce qui menaçait de m’échapper dans la sécurité de l’obscurité.

– Que se passe-t-il ? a demandé Aventurine d’une voix méfiante. Qu’est-ce que tu fais ? Tu es bizarre.

J’ai haussé les épaules et inspiré profondément pour repousser mes larmes.

– C’est juste… Tu n’as toujours pas compris ? Personne ne veille sur moi. C’est comme ça que ça marche. Je veille seule sur moi. Toujours.

Et j’étais douée pour ça. Du moins, je l’avais été, jusqu’à ce que je me jette la tête la première dans le pétrin, si bêtement persuadée de réussir à relever tous les défis au palais…

Non. C’étaient des paroles de victime, pas d’héroïne. Je n’allais pas admettre ma défaite maintenant !

Je me suis levée d’un bond et j’ai tapé dans mes mains.

– Bon ! Il faut que je me mette au travail.

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