Hors les murs by Park Wan-seo

Hors les murs by Park Wan-seo

Auteur:Park Wan-seo [Wan-seo, Park]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Autobiographie
Éditeur: Atelier des Cahiers
Publié: 2012-06-29T22:00:00+00:00


7

Maman et mon frère

Avec les signes avant-coureurs de la défaite japonaise, la vie était devenue de plus en plus difficile. Le service obligatoire pour tous les jeunes Coréens a remplacé la politique d’engagement volontaire. Mon frère était trop jeune pour être mobilisé, mais il pouvait être réquisitionné n’importe quand pour le service du travail obligatoire. Maman se lamentait en disant que s’il était resté dans les services administratifs du gouverneur, il aurait échappé à la réquisition, mais mon frère la rassurait en lui disant qu’elle n’avait pas de souci à se faire parce que l’usine Watanabe où il travaillait fabriquait maintenant du matériel militaire.

À cette époque, les Japonais avaient fait composer un opéra célébrant la vie héroïque du premier volontaire coréen mort au combat, le caporal Lee In-Seok. La radio le diffusait tous les jours quand a commencé le matraquage psychologique pour envoyer les jeunes coréens au front. Dès que mon frère l’entendait, il ordonnait d’un ton exaspéré d’éteindre la radio, il l’avait en horreur.

À partir du second semestre, il me fut impossible de ne pas travailler. L’institutrice, même quand elle était obligée de rester chez elle à cause de sa mauvaise entorse, gardait un contact étroit avec la déléguée de classe à qui elle transmettait ses directives, les sujets d’examen, les corrections et même les punitions. Comme c’était une Coréenne mariée et mère d’une fille, maman l’appréciait beaucoup. À cette époque, il arrivait que les instituteurs coréens s’adressent en japonais aux parents et qu’ils se fassent traduire pour ceux qui ne parlaient pas japonais. Mais il n’en était pas ainsi de notre institutrice et c’est pourquoi maman en était très contente.

Elle avait une manière très particulière et odieuse de nous punir. Sur les cinq classes de la sixième année, il y en avait deux de filles. Je veux bien croire que son but était de nous faire obtenir de meilleures notes, mais elle n’arrêtait pas de nous mettre en concurrence avec l’autre classe. Si nous avions des notes un peu inférieures aux examens communs, elle nous donnait une punition collective. Elle en avait inventé une absolument inhumaine : avec notre voisine, nous devions nous mettre debout face à face et nous gifler l’une l’autre jusqu’à ce que l’institutrice nous dise d’arrêter.

On pourrait penser que nous nous giflions légèrement, mais pas du tout. Si nous n’étions pas assez violentes, l’institutrice, un mauvais sourire aux coins des lèvres, nous menaçait de ne pas arrêter la punition. Mais, ce n’est pas tout, nous finissions par avoir l’impression que l’autre nous faisait plus mal et donc par frapper de plus en plus fort.

Essayez de vous représenter ce spectacle : des gamines de treize à quatorze ans qui, debout face à face, se frappent sans arrêt de la main avec une haine grandissante jusqu’à ce que leurs joues en deviennent bleues. N’est-ce pas la vision d’un enfer sans possibilité de rédemption ?

Comme Boksun et moi avions à peu près la même taille et des résultats équivalents, nous étions très souvent l’une à côté de l’autre, que les places soient fixées en fonction des notes ou de la taille.



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