Histoires Diablement Habiles by Hitchcock Alfred

Auteur:Hitchcock, Alfred [Hitchcock, Alfred]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Fantastique, Policier, Suspense
Éditeur: Le livre de poche
Publié: 2014-03-31T22:00:00+00:00

UN COIN PERDU

(Lonely Place)

par DOUGLAS FARR

L’homme fit son apparition, juste après midi, en cette chaude journée de juillet. Ce fut Stella qui le vit la première et sa tête ne lui plut pas.

Il venait de l’ouest et s’avançait à pas traînants le long de la route, la tête protégée du soleil brûlant par un informe chapeau de feutre à larges bords. Il prenait tout son temps et ressemblait davantage à un homme qui se promène le long d’une avenue ombragée qu’au vagabond qu’il était de toute évidence, cheminant seul sur cette route écartée, à quinze kilomètres de nulle part.

Stella Cousins profitait d’un de ses rares moments de répit sur le pas de sa porte. Il lui arrivait parfois de rester, là, debout sur le seuil, à regarder la route, bien qu’elle eût été incapable de dire pourquoi elle avait pris cette habitude. Ou pourquoi elle se trouvait là, à regarder la route en ce moment, au lieu d’être dans la cuisine, assise à la table en face d’Emery pendant qu'il finissait de déjeuner. C’est ce qu’une bonne épouse aurait été en train de faire.

Si elle avait fait son devoir, si elle s’était trouvée dans la cuisine, elle n’aurait pas été sur le pas de la porte à ce moment précis et peut-être l’homme ne l’aurait-il pas vue... et ne se serait-il pas arrêté.

Mais c’était un spectacle inhabituel que celui d’un passant sur cette route. Il arrivait parfois qu’un camion ou une voiture y passât, mais il était si rare de voir un piéton que, toute réflexion faite, Stella ne se souvenait pas que la chose se fût déjà produite. Aussi resta-t-elle sur le pas de sa porte, comme fascinée.

L’homme avait vu la maison, bien entendu. Celle-ci n’avait pu manquer d’attirer son attention, étant donné que c’était la seule maison en vue sur cette portion de route. Mais il ne donnait pas l’impression de se diriger vers elle particulièrement.

Alors où va-t-il ? se demanda Stella tandis qu’il approchait. Qui est-ce ? Ce n’était pas un voisin. Il était peu probable que ce fût un auto-stoppeur ou un automobiliste en panne d’essence. Donc, il fallait que ce fût un vagabond. Stella frissonna ; elle avait horreur des vagabonds.

Tandis qu’elle l’observait, tout en redoutant qu’il ne s’arrêtât, il s’immobilisa près de l’allée de terre poussiéreuse et repoussa son chapeau en arrière. Il se trouvait encore à quelque cinquante mètres de Stella et elle ne pouvait pas voir vraiment de quoi il avait l’air ; à peine se rendait-elle compte que son visage était sombre. Et elle pouvait voir aussi qu’il regardait les pêchers, par-delà la maison, sur la gauche.

Oh ! Non, pensa-t-elle, par pitié, non ! Il voit que les pêches sont presque mûres et il se demande si nous n’avons pas besoin d’aide. Eh bien, nous n’en n’avons pas besoin... si, peut-être... mais pas cet homme...

Puis, brusquement, Stella vit que le regard de l’homme s’était détaché des arbres et qu’il fixait la maison. Pas exactement la maison, d’ailleurs. Mais elle. Elle aurait

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