Histoire de la violence by Louis Édouard

Histoire de la violence by Louis Édouard

Auteur:Louis,Édouard [Louis,Édouard]
La langue: eng
Format: epub
Tags: 2016-01-19T11:24:45.273000+01:00
Amazon: B0198FONR8
Éditeur: Seuil
Publié: 2016-01-06T23:00:00+00:00


Elle comprenait, avant même qu’ils aient dit un mot. Et déjà elle s’emportait ; « Ah c’est pas vrai qu’est-ce qu’il a encore fait celui-là, mais brun, il me foutra jamais la paix il va continuer jusqu’à que j’y reste à cause d’une crise de nerfs, quel malheur, quel malheur d’avoir une vache et pis pas de beurre » ; et donc les gendarmes lui disaient sans surprise : « Votre fils », ou pas « Votre fils » mais directement son prénom puisqu’ils le connaissaient depuis ses premiers jours au monde, depuis ses premiers pas dans les rues du village et que leurs enfants avaient grandi avec lui et étaient allés dans la même école que lui, dans le même collège puis le même lycée avant qu’il abandonne, tandis que leurs enfants à eux continuaient un peu plus longtemps puisqu’ils étaient enfants de gendarmes, souvent pour devenir gendarmes à leur tour, comme si l’alternative pour ces enfants qui avaient grandi ensemble avait été de devenir voleur pour se faire arrêter par les anciens amis devenus gendarmes ou de devenir gendarme afin d’arrêter les anciens amis qui volaient. Ils lui disaient : « Votre fils a été arrêté le sac plein de marchandises et surtout de bouteilles d’alcool au supermarché Carrefour », et ma mère qui était désolée, et disait : « Je sais bien je sais bien c’est pas la première ni la dernière je crois bien malheureusement, je serai entre quatre planches six pieds sous terre qu’il continuera encore, ah, quel malheur d’avoir un cochon et pis pas de jambon, écoutez il payera pour ce qu’il a fait et c’est tout, qu’est-ce que je peux y faire j’ai honte. J’ai plus rien à faire d’autre que d’avoir la honte. » Et finalement, puisque de toute façon elle ne pouvait pas l’en empêcher, qu’elle était consciente de son impuissance face à mon frère et qu’elle savait qu’il allait recommencer, et que quoi qu’il fasse elle lui pardonnerait, voyant dans tous ses actes de délinquance le dernier avant son assagissement et une transformation totale et radicale, elle prenait le parti d’en rire. Avant d’en rire, quand il était encore temps pour la gravité, son entourage lui disait que le comportement de son fils, mon grand frère, ses vols et le reste étaient insupportables, intolérables, inacceptables, et qu’elle ne pouvait pas continuer à lui donner de l’argent – l’argent qu’il lui réclamait, qu’elle n’avait pas et qu’elle faisait tout pour trouver quand même et lui donner. Elle disait : « Je peux quand même pas laisser mon gosse crever de faim », même si on l’avertissait qu’avec cet argent il achèterait de l’alcool, qu’avec cet alcool il serait saoul et incontrôlable, et qu’à cause de cet état d’ivresse qui était devenu son mode de vie il irait voler d’autres bouteilles dans les supermarchés. Et que le cycle reprendrait. Mais chaque fois elle prétendait que ça n’aurait plus jamais lieu et que c’était la dernière fois. Elle disait que son fils avait



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