[Gilgamesh-1] Gilgamesh, roi d'Ourouk by Silverberg Robert

[Gilgamesh-1] Gilgamesh, roi d'Ourouk by Silverberg Robert

Auteur:Silverberg,Robert
La langue: fra
Format: mobi
Tags: Fantasy
ISBN: 2070415864
Éditeur: AlexandriZ
Publié: 1984-01-01T00:00:00+00:00


21

Nous avons bientôt laissé derrière nous les basses terres baignées de chaleur, les palmeraies de dattiers, le ventre d’or du désert, et nous avons abordé les vertes et fraîches hauteurs orientales.

Nous voyagions à marche forcée, de l’aube au crépuscule ; sept montagnes nous avons passées, l’une après l’autre et sans faire de pause, jusqu’à ce qu’enfin nous apparaissent les forêts de cèdres : légions d’arbres innombrables alignés sur les versants de l’âpre pays qui s’étendait devant nous. Qu’il était étrange à nos yeux d’hommes d’une contrée dépourvue d’arbres, ce paysage infiniment boisé ! Les collines déchiquetées en devenaient presque noires. Et les arbres nous semblaient à l’image d’une armée hostile dans l’attente sereine de notre assaut.

Ces reliefs tourmentés de crêtes et de ravins rocailleux présentaient une autre singularité : les flammes des dieux et des démons proscrits y jaillissaient de la pierre, çà et là, ainsi que leurs épanchements d’huile épaisse et noire qui s’écoulaient vers nous comme les serpents engourdis des mondes infernaux. Car nous entrions dans les terres que l’on nomme les Provinces rebelles depuis qu’y furent exilés les dieux insurgés contre Enlil. Guerriers victorieux, Enlil, Ninurta et Ningirsu y bannirent leurs ennemis au lendemain de l’antique et terrible bataille des dieux ; c’est là qu’ils demeuraient encore confinés, maussades et boudeurs, faisant trembler la terre, exhalant de fortes bouffées de flammes et de fumées, tandis que leurs serpents d’huile grasse suintaient des profondeurs de la terre. À chaque pas nous pénétrions plus profondément dans ce royaume obscur, conscients de la présence de divinités malveillantes aux yeux rouges, qui reniflaient et haletaient sous nos pieds.

Nous n’avons pas laissé la peur nous envahir. Nous faisions halte quand il le fallait, afin de rendre nos dévotions à Utu, An, Enlil, Inanna. Lorsque à la nuit nous nous arrêtions pour camper, nous creusions des puits et les eaux saintes qui remontaient à la surface nous tenaient lieu d’offrandes. Enfin, avant de m’endormir, j’invoquais Lugalbanda et je prenais conseil car il avait lui-même séjourné dans cette contrée, en proie aux vapeurs et aux émanations toxiques des dieux rebelles. Sa présence m’était d’un grand réconfort.

Enkidou connaissait bien le pays. Comme la créature sauvage qu’il avait été autrefois, il nous guidait sans hésitation dans notre marche interminable, loin de toute piste. Il nous faisait contourner les espaces calcinés et noircis par le souffle brûlant des esprits maléfiques. Il nous conduisait par-delà les régions où la terre avait glissé, s’était brisée, soulevée, rendant le territoire infranchissable ; par-delà d’épaisses nappes d’huile comme de noirs étangs sur le ventre du monde. Et nous nous approchions de la forêt profonde, du domaine interdit du démon Huwawa.

Nous voici parmi les premiers cèdres isolés. Si nous n’étions venus que pour le bois, nous aurions pu, j’imagine, abattre quelques douzaines d’arbres et les ramener triomphalement en Ourouk. Mais nous n’étions pas venus seulement pour le bois.

Enkidou : « La grande porte se trouve par ici, qui délimite la futaie sacrée. Nous en sommes tout près maintenant.

— Et Huwawa ?

— De l’autre côté de la porte, à proximité.



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