[Fortune de france 11] la gloire et les périls by Robert Merle

[Fortune de france 11] la gloire et les périls by Robert Merle

Auteur:Robert Merle [Merle, Robert]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Histoire
ISBN: 9782702832929
Publié: 1999-04-12T21:55:11+00:00


*

* *

Nicolas et Madame de Bazimont, dès la minute où j’eus mis le pied dans le château, ne furent pas sans s’apercevoir que j’étais tout chaffourré de chagrin. Mais si Nicolas n’osa pas me poser à ce sujet les questions qui lui brûlaient les lèvres, Madame de Bazimont était à la fois trop curieuse et trop maternelle pour ne pas quérir de moi le pourquoi de cette mélancolie. Et pour moi, je lui avais trop de gratitude pour les soins infinis dont elle nous entourait pour ne point désirer de la satisfaire.

— Mon Dieu ! s’écria-t-elle. Le docteur Héroard est mort ! Le médecin du roi ! Faut-il qu’il ait été savant en sa médecine pour qu’on lui permît de soigner le souverain ! Et le voilà mort ! N’est-ce pas étrange que les grands médecins meurent ! Eux qui savent tous les remèdes !…

Cette naïveté titilla mon Nicolas et je lui jetai un œil sévère pour qu’il réprimât le sourire qui naissait sur les commissures de ses lèvres.

— C’est qu’il était fort avancé en âge, dis-je, et très lassé de son grand labeur.

Là-dessus, Luc, qui s’était pour sa part fort bien rebiscoulé de son intempérie, vint nous annoncer que le dîner était servi. Et avec sa coutumière discrétion, Madame de Bazimont nous quitta dans un grand froissement de son demi-vertugadin – qui, comme bien sait ma belle lectrice, était la grande coquetterie de sa vie.

Dès que nous fûmes au bec à bec à table, mangeant tristement notre rôt, mon Nicolas me demanda sotto voce si Héroard était un aussi bon médecin qu’on le disait à la Cour.

— D’après mon père, dis-je, c’était un médecin dans la tradition du Maître Rondelet de l’École de médecine de Montpellier. Il croyait que le mal, venant de réplétion, ne manquait d’être guéri par l’évacuation : clystère, purgation et saignée. Ajoutons la diète, pour faire bonne mesure. Et voilà notre malade déjà très affaibli.

— Ce n’était donc pas un bon médecin ?

— Mais si, Nicolas. Bon, il l’était sous certains aspects. Il aimait Louis de grande amour et lui était corps et âme dévoué et lui rendait de grandissimes services en refrénant sa goinfrerie, en l’empêchant de s’exténuer à la chasse, en l’obligeant de se coucher tôt et en combattant ses accès de fièvre par la quinine. En outre, Louis avait grande fiance en lui et la fiance est, comme on sait, la moitié de la guérison. Sans Héroard, Louis doit se sentir aujourd’hui perdu. Et à mon sentiment, la disparition de son médecin n’est pas étrangère à sa décision de se retirer quelques semaines en Paris. Et d’autant qu’il sera, en sa capitale, plus à même de recruter un nouvel Esculape de quelque renommée.

Notre repue avalée, Luc et les valets furent prompts à enlever nappe et couverts de la table et nous passâmes alors comme à l’accoutumée dans un cabinet fort bien accommodé en meubles où Luc installait déjà les pots de la tisane du soir. Là-dessus, Madame de Bazimont réapparut, ses cheveux d’un blanc neigeux fort bien recoiffés et, renvoyant le valet, désira nous servir de ses mains.



Télécharger



Déni de responsabilité:
Ce site ne stocke aucun fichier sur son serveur. Nous ne faisons qu'indexer et lier au contenu fourni par d'autres sites. Veuillez contacter les fournisseurs de contenu pour supprimer le contenu des droits d'auteur, le cas échéant, et nous envoyer un courrier électronique. Nous supprimerons immédiatement les liens ou contenus pertinents.