[Fortune de france 02] en nos vertes années by Robert Merle

[Fortune de france 02] en nos vertes années by Robert Merle

Auteur:Robert Merle [Merle, Robert]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Histoire
ISBN: 9782253135364
Publié: 1979-01-16T23:00:00+00:00


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Le lendemain soir, j’appris par ma bonne Thomassine, fort dépit et troublée que Cossolat était venu voir Dame Gertrude du Luc pendant que Samson assistait aux lectures de l’école et qu’il était resté trois heures enfermé avec la belle dévote dans sa chambre. La Thomassine me demanda d’aller incontinent trouver cette femme sans vergogne pour lui reprocher l’inconvenance de son déportement. Mais je ne voulus y consentir, craignant que cette Circé ne me transformât à mon tour en pourceau, rien qu’en nouant ses beaux bras ronds autour de mon col. Je ne voulus pas non plus en toucher mot à Cossolat, dont je savais bien qu’il ne ferait que se gausser, aimant à dire qu’à chaque fois qu’un pèlerinage faisait étape à Montpellier, il se trouvait une Roumieuse pour oublier ses saints sur son sein. Et à cette gasconnade que répondre ? Rire avec lui ou se fâcher ? Et se fâcher jusqu’où ?

Cependant la pensée me poignait que mon pauvre Samson apprenant par aventure l’infidélité de sa maîtresse fût navré de ce coup, cruel certes pour tout homme et davantage pour lui en sa colombine innocence. Et ainsi fort tracassé pour lui et ne sachant que résoudre pour lui éviter ce chagrin, à peu que je n’oubliasse le souci que je me faisais pour ma pauvre Fontanette.

Tout le jour et la nuit suivante je retournai sans fruit cette traverse dans ma tête et au matin je n’avais rien trouvé qui pût me permettre d’éloigner cette Circé, et de Samson, et de Cossolat, et de moi, car à dire vrai, la pensée qu’elle aimait tant les vifs n’était pas sans me donner des tentations, quelque horreur que je ressentisse à l’idée de tromper mon pauvre frère, et pis encore sous le toit de la Thomassine.

Même en écoutant, à l’école, Saporta commenter Avicenne, ce tracassin ne me quittait point, et quand Saporta m’appela à sa chaire après sa lecture, je crus que c’était pour me tancer de mon inattention. Mais il requit après moi Merdanson et l’apprenti-chirurgien Carajac. Et après nous avoir regardés un moment du haut de sa chaire de son œil noir et menaçant (car il aimait nous donner le sentiment que notre innocence présente n’était que la forme et substance de notre culpabilité future), il nous dit que le garde de l’hôpital serait disposé à céder à l’école le corps d’un gueux qui venait d’y rendre l’âme, et nous commanda d’aller envisager avec soin ce quidam et de reconnaître s’il était propre à être disséqué.

Nous y fûmes, non sans un certain air de piaffe et le sentiment que notre mission était de conséquence. Le garde de l’hôpital était chauve, fort laid, d’haleine puante, et d’une maigreur que Merdanson trouva à voix basse « intéressante », ajoutant en me donnant un coup de coude : « Tu m’entends, compain ? » Le garde nous dit s’appeler Russec et incontinent nous amena à une petite pièce fort sombre (car les rideaux étaient tirés) et où régnait une odeur si



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