FNA 1659-Poupée aux yeux morts 3-Les futurs mystères de Paris by Roland C. Wagner

FNA 1659-Poupée aux yeux morts 3-Les futurs mystères de Paris by Roland C. Wagner

Auteur:Roland C. Wagner [Wagner, Roland C.]
La langue: fra
Format: epub
Tags: SF
Publié: 1988-12-15T23:00:00+00:00


CHAPITRE V

Je vis. C’est impossible, mais je vis.

Je garde le souvenir de ma mort, de l’arrêt de mes fonctions vitales. Le cœur qui se bloque au milieu d’une contraction, les poumons qui cessent de palpiter, le sang qui devient épais et refuse de continuer à couler…

Je me souviens de chaque détail, avec une précision clinique. L’aiguille luisante reliée à un tuyau par lequel la mort va venir, l’aiguille qu’un anonyme plante à la saignée du coude, tandis que derrière la cloison, un autre anonyme se préparer à presser le piston…

C’est une image ; tout est automatisé, de nos jours.

Je me souviens de ma terreur, de ce froid qui m’a envahi avant même que le poison ne s’infiltre en moi. Je me souviens de tout cela – et, pourtant, je vis.

Je m’éveillai au milieu d’un cauchemar, assis dans un genre de cercueil de plastique froid… Une pellicule tiède collait mes paupières closes. Je voulus l’ôter, mais quelqu’un retint ma main.

— Restez calme. Vous êtes encore trop faible.

Je me laissai retomber au fond du sarcophage. Le cauchemar s’éloignait peu à peu, tandis que la mémoire me revenait. Je tentai de parler, mais ne parvins à émettre qu’un coassement rauque.

— Vous avez parfaitement supporté l’hypothermie, reprit la voix. Et la date est bien celle que vous aviez choisie pour votre éveil.

Des mains habiles entreprirent de me masser énergiquement. Mes muscles noués ne tardèrent pas à se détendre. Puis l’on m’injecta quelque chose à la saignée du coude et je sentis une vigueur nouvelle monter en moi.

— Je vais essuyer vos paupières. Il est possible qu’au début vous ne puissiez pas voir grand-chose. C’est normal. Vous n’avez pas de raison de vous inquiéter. Tout s’est bien passé. Cette date est bien celle que vous aviez choisie pour votre réveil…

Je battis des paupières. Tout d’abord, je ne distinguai que des taches de couleur se déplaçant sur un fond blanc, puis les détails commencèrent à apparaître. Cette flaque brunâtre était le visage d’une infirmière africaine et cette autre, blafarde, la face lunaire d’un médecin dont les incisives portaient incrustés des saphirs.

— Tout s’est bien passé…, reprit le médecin.

— Je m’en rends compte, coupai-je sèchement. Quelle heure est-il ?

La question surprit le médecin ; on devait souvent s’enquérir de la date, pour une ultime confirmation, mais c’était vraisemblablement la première fois qu’un de ses patients lui demandait l’heure.

— Dix heures du matin, répondit-il doucement. Vous avez dormi cinquante ans.

— Parfait, murmurai-je.

L’infirmière s’approcha, un papier à la main. Je crus que j’allais avoir droit au sermon sur la réinsertion qu’on infligeait aux hibernés ; il n’en était rien. La jeune femme me demanda mon identité, ma date de naissance et les raisons pour lesquelles j’avais choisi la Fuite en Avant, comme on l’appelait parfois. Je prétendis m’appeler Gilbert Gocrazy, né cent vingt ans plus tôt à New York, puis j’expliquai brièvement que j’avais opté pour l’hibernation afin de retrouver mon fils à son retour de la Longue Nuit. Ces arguments furent reçus et notés sans la moindre trace de sentiment ou de suspicion.



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