Fiction 114 by Collectif

Fiction 114 by Collectif

Auteur:Collectif [Collectif]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Fantastiques, Nouvelles
Éditeur: opta
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00


Le lendemain le temps était à l'orage. Cela intensifia mon angoisse. Vers quatre heures seulement je réussis à sortir de mon engourdissement. Héléna vint voir si je n'étais pas malade. C'est la dernière fois que je l'ai vue vivante, elle avait un pull sport blanc et une jupe plissée bleu marine. Sa queue de cheval était nattée serré. Elle fut charmante et attentionnée et, la bonne étant sortie, m'apporta elle-même du thé brûlant et des toasts. Je la regardais avec attendrissement, comme si ce sixième sens auquel je commençais à croire m'eût avertie que je la voyais pour la dernière fois. Comme elle était douce, comme elle était jolie, comme je l'aimais…

Douce, douce, jolie, jolie, Héléna… Ô Clarisse, je l'aimais, comment pouvait-on la voir vivre sans l'aimer ?… Jacques… Il n'avait pas pu, moi non plus je ne peux pas… Je la regardais. Je sentais des larmes me monter aux yeux. Héléna… comment lui dire quelque chose qui lui fasse comprendre combien elle m'était chère ? Hélas, je n'étais pour elle que la femme de trente-cinq ans qui lui avait pris son fiancé. « Vous n'avez besoin de rien ? » Sa voix… je ne devais plus l'entendre… « Non, merci. Vous êtes très gentille. » Elle eut un fugitif sourire et sortit.

Peu après elle quitta la maison ; je m'étendis sur le divan du salon sans prendre la peine d'ôter mes chaussures et m'endormis lourdement C'est le bruit de sa clef dans la serrure qui m'éveilla, il était huit heures moins le quart ; ainsi je ne sortais du sommeil que pour retomber dans l'angoisse habituelle.

L'orage qui grondait depuis le matin éclata soudain avec une violence sauvage ; je me levai pour fermer les fenêtres. Dans la chambre rose, la baie claquait follement. Je m'y précipitai… enfin…

L'eau pénétrait en trombe, des rafales de vent déchaîné rabattaient d'énormes paquets de pluie jusqu'à l'autre extrémité de la chambre. Des gravures arrachées des murs, des bibelots fracassés, jonchaient le sol… Quand j'entrai, le grand vase de céramique rempli de bruyère fut balayé par la rafale et alla s'écraser sur le parquet. Je bondis vers la baie que j'eus beaucoup de mal à fermer ; puis je me retournai, le dos aux éclairs, à la pluie, à tout ce déchaînement qui ne m'effrayait pas, je me retournai, et des yeux cherchai Héléna. Je m'attendais à la trouver étendue devant la cheminée, soit à plat ventre, la tête dans ses bras, soit sur le dos avec de grands yeux ouverts et fixes…

Mais devant la cheminée, il n'y avait personne.

Ni sur le lit.

Ni ailleurs.

Héléna n'était pas là.

Héléna n'était pas là.

Porte close, close sur une absence.

Je me suis mise à hurler son nom comme une démente. J'ai ouvert la penderie, regardé sous le lit… puis de nouveau debout, criant, appelant, hurlant. Impossible d'accepter une telle absurdité. « Héléna, Héléna, revenez, je vous l'ordonne, je vous prie, je t'en prie, Héléna…»

Vagabondant ainsi à travers la chambre, j'arrivai soudain devant la cheminée, et là, je vis le miroir, posé sur le sol… un long rectangle brillant, parsemé de gouttelettes de pluie.



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