Feu sur le juge! by John Dickson Carr

Auteur:John Dickson Carr [Carr, John Dickson]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Policier
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00

Ils restèrent longtemps à se dévisager. Puis, Kathleen Mills, le visage plus coloré qu’à l’ordinaire, s’exprima avec beaucoup de dignité.

— Enchantée ! déclara-t-elle, pleine de correction. Quoique très heureuse de faire votre connaissance Dr Chase, j’ai bien peur qu’en toute honnêteté, il me faille saisir cette occasion pour vous dire que je qualifierai vos vues sur l’Eglise anglicane d’Ecosse, d’âneries de primaire. En effet, comme je l’ai souligné dans le Quarterly Survey, il semble que vous n’ayez jamais entendu parler, pour ainsi dire, du Nottingham’s Comprehension Bill[2]. (Et d’ajouter, l’air à demi ennuyé :) Mais où donc est votre barbe ? J’imaginais que vous portiez la barbe.

— Je me vois obligé de ne pas être d’accord avec vous, dit Chase. Je ne parle pas de la barbe, mais de vos premières remarques. Et si vous vouliez me faire l’honneur d’accepter une tasse de café – ou un verre de bière. (Il s’interrompit dubitatif :) Aimez-vous la bière ?

— Naturellement, dit la jeune fille, et cela me ferait grand plaisir d’en boire. Mais je pensais à ce chahut intolérable. Comme je le disais, il doit bien venir de quelque part.

En effet, ils l’entendaient parfaitement bien, plus assourdi, mais terriblement insistant. Dans l’immeuble si tranquille après minuit, cela semblait presque provenir d’un autre monde. Et sous le calme de Kathleen Mills, Chase sentait percer une émotion, comme si elle se sentait très à l’aise. Les yeux de Chase se portèrent sur la sombre porte de l’appartement 11, à côté d’eux.

— Cela ne viendrait-il pas de l’appartement voisin ?

— J’y ai bien pensé, admit-elle, peut-être un peu trop précipitamment. Cela a été ma première idée. Mais c’est… eh bien, c’est un appartement vide : le seul qui reste à louer dans tout l’immeuble. Et il semble invraisemblable que quelqu’un fasse marcher un poste de radio dans un appartement vide.

Chase se sentit pris d’un doute. La vision d’une radio jouant dans un appartement sombre et inoccupé était ce qu’il aurait appelé une vue irrationnelle de l’esprit. La jeune fille poursuivit :

— Des superstitions liées à de simples murs et à du plâtre sont stupides. Nous sommes des êtres raisonnables, Dr Chase ; tout au moins, je l’espère. Supposez qu’un acte criminel, un acte de violence ait eu lieu dans une certaine maison. Bon ! La maison est démolie pour être remplacée par une autre… disons un immeuble de rapport. Supposez même que vous croyiez aux manifestations ou aux influences supernaturelles, ce qui n’est pas mon cas. Y a-t-il là quelque raison pour que ces influences se fassent sentir dans un certain appartement du rez-de-chaussée, et non dans un des appartements situés au-dessus ? C’est absurde.

— Dites-moi un peu, demanda tranquillement Chase. De quoi diable parlez-vous ?

— Eh bien, de l’appartement voisin. Il paraît que des douzaines de personnes sont venues le visiter, et toutes ont refusé de le louer. Je vous assure que je ne peux comprendre pourquoi. Il n’a absolument rien qui cloche. Il est exactement pareil à vingt autres ; Mr Hemphill, l’agent immobilier, le jure sur tous les tons.

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