Essai sur la connaissance de Dieu by Claude Tresmontant

Auteur:Claude Tresmontant [Tresmontant, Claude]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Philosophie, Théologie
ISBN: 9782204122368
Éditeur: Les éditions du Cerf
Publié: 2017-05-05T04:00:00+00:00

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L’intelligence qui a opéré et qui continue d’opérer dans le monde, qui en a organisé la multiple structure, qui en constitue l’intelligibilité, ne saurait être purement immanente à ce qu’elle organise et édifie. La synthèse, disions-nous, transcende les éléments qu’elle intègre. Elle est, d’une certaine manière, comme on le voit dans les organismes vivants, indépendante de chaque élément en particulier. Dans un organisme vivant, les éléments matériels physico-chimiques se renouvellent complètement au bout d’un certain laps de temps.

De même, on peut dire que, d’une certaine manière, l’intelligence, la personnalité, la liberté, transcendent les êtres constitués intelligents, personnels, libres. L’intelligence organisatrice transcende chacun d’eux, pris un à un, elle est antérieure et postérieure à chacun d’eux. Elle continue son œuvre, alors que chaque être, pris isolément, meurt. Elle n’est prisonnière d’aucun. Elle fait son œuvre. Aucun être ne la possède. Aucun être ne peut lui assigner ses limites. Au secondaire, au tertiaire, elle se manifestait par tel ou tel type d’organisme vivant. Ultérieurement, elle a inventé d’autres espèces, d’autres formes de vie. Pas plus aujourd’hui qu’hier aucun être vivant ne peut lui assigner des limites sans ridicule outrecuidance. La matière semble travaillée, traversée, selon l’image bergsonienne, par un élan de conscience organisatrice, par une intelligence créatrice. L’intelligence organisatrice est autre chose que la matière organisée. La matière par elle-même, à son niveau physique, ne suffit pas à rendre compte des réalisations dans lesquelles elle est entraînée et transformée, surélevée.

On peut dire autre chose encore de cette intelligence qui opère dans le monde en le créant, mais qui le transcende.

La création est don. Elle est don pour l’homme. L’existence est don, et la création est don pour les êtres existants. Nous ne reprendrons pas les thèmes bien connus de l’apologétique, que l’apôtre Paul dans ses missions a développés : la création tout entière est don, la pluie, le soleil, le pain et l’eau, l’homme pour la femme et la femme pour l’homme, sont don et joie. La beauté du monde est don, sa saveur, sa splendeur. La nature est jubilation.

Cela n’enlève rien à la difficulté du problème du mal et de la souffrance. Mais le don de l’être et de la création est premier. Le problème du mal est un problème dont on ne saurait surestimer la gravité, mais c’est un problème second par rapport à l’existence et à la vie. Pour qu’il y ait problème du mal, souffrance et mort, il faut d’abord qu’il y ait vie.

Le thème apologétique utilisé adroitement ou maladroitement contient donc un noyau métaphysique irrécusable.

On peut donc aller jusqu’à dire que, aux yeux de la pensée rationnelle naturelle, le monde apparaît comme la manifestation d’un amour créateur. L’Absolu est don et amour.

Précisons ce point. La création est don : d’abord ce don de l’être que nous sommes, ce don de l’existence pour nous qui sommes. Puis, à ces êtres créés, le don des biens de la création. A ces êtres désirants, le don de ce qu’ils désirent. A cette faim, le don du fruit. Pour l’homme, le don que constitue la femme, pour la femme ce don qu’est l’homme.

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