En voilà des mœurs ! by Richard Deming

Auteur:Richard Deming [Deming, Richard]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Policier
Éditeur: Gallimard - Série Noire
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00

CHAPITRE XIV

Il était passé minuit quand nous quittâmes les lieux. Le fourgon du Coroner était venu prendre livraison du corps, le lieutenant Wynn avait congédié l’homme du labo et le photographe et renvoyé tous les témoins dans leurs foyers à la condition expresse de ne pas quitter la ville sans autorisation. Puis lui et Hank Carter étaient partis avec Sharon.

Je réunis mon équipe sur la pelouse de façade pour lui donner mes dernières instructions.

— Vous remettrez ces « joncs », ces mégots et le contenu de ce bol demain matin au labo, dis-je. Non que ça puisse servir à grand-chose. J’ai idée que les inculpations pour mœurs et usage de stupéfiants vont être annulées en raison de la présence de Greco.

— On aura de la veine si ça s’arrête là, dit Carl. Comment se fait-il que tu ne l’aies pas reconnu, Matt ?

Je le considérai d’un œil froid.

— En outre, poursuivis-je sans tenir compte de la question, le lieutenant Wynn m’a chargé de vous recommander, les gars, de ne pas piper mot de la rafle aux reporters. Vous voilà donc prévenus. C’est tout. Vous pouvez disposer du restant de la soirée.

J’eus droit à un murmure de remerciements ironiques, sur quoi ils regagnèrent tous les paniers à salade dans lesquels ils étaient arrivés.

— Ne m’attends pas, Ed, cria Carl au chauffeur de la voiture qui l’avait amené. Je resquille un bout de chemin avec Matt.

Tandis que j’écartais la Ford de location du trottoir, Carl me demanda :

— Qu’est-ce qui t’a pris ce soir, Matt ?

— Écoute, dis-je d’un ton plein de patience, je t’ai répété une demi-douzaine de fois que le type était là sous un nom d’emprunt.

— Je ne parle pas de Greco. Est-ce que tu en pinces pour cette petite rouquine ?

— Ne fais pas l’idiot, répliquai-je sèchement.

— Voyons, tu ne t’es pas privé de te bagarrer pour sa cause. Le lieutenant Wynn avait raison. Tu ne te comportais guère en flic.

— Comment un flic est-il censé se comporter quand il pense qu’on accuse quelqu’un à tort ? lui demandai-je.

— Tu en pinces pour elle, dit Carl.

— Oh ! va donc t’occuper de tes oignons, lui dis-je. Tu as vu le genre de truc que c’était ce soir. Crois-tu que je pourrais m’emballer pour une fille qui a des mœurs comme ça ? J’ai pitié d’elle, voilà tout.

— Pourquoi ? Il n’y avait pas là-bas un seul invité qui mérite de la pitié.

— Là tu ne te comportes pas en flic. On n’envoie pas les gens à la chambre à gaz pour mœurs dissolues. Elle est tellement paumée qu’il faudrait probablement un psychiatre pour la redresser, mais je ne crois pas qu’elle ait tué Isobel. Au fond, c’est une bonne gosse en dépit de ses mœurs.

— Je reconnais qu’elle a une bonne silhouette, dit Carl avec cynisme. J’ai remarqué que tu n’appréciais pas que je la regarde.

— Si tu cherches à m’échauffer la bile, dis-je, tu y réussis. Je n’ai pas le béguin pour cette fille. J’avoue que je l’aime bien.

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