Comment j’ai cessé d’être juif: un regard israélien by Shlomo Sand

Comment j’ai cessé d’être juif: un regard israélien by Shlomo Sand

Auteur:Shlomo Sand [Sand, Shlomo]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Social, Politique, Essai, Histoire
ISBN: 9782081303713
Google: 9gDreH7heCsC
Publié: 2013-03-12T04:00:00+00:00


L’appareil éducatif et l’appareil militaire

Pendant ce temps, les élites poursuivaient énergiquement la production et la diffusion d’une culture nouvelle ayant conquis son hégémonie, comme on l’a vu précédemment, dans le rapport de forces politique et intellectuel. Elles disposaient de deux leviers conjoints, à une époque où la télévision n’existait pas encore : le système d’éducation et l’appareil militaire (et, dans une moindre mesure, la presse écrite). Dans toutes les écoles, les maîtres apprenaient à leurs élèves à parler et lire l’hébreu, et leur enseignaient la Bible comme un livre d’histoire héroïque et laïque. Dès avant la création de l’État, la formule « de la Bible au Palmakh[1] » était répandue. Autrement dit, importaient véritablement en histoire la souveraineté hébraïque imaginaire de l’Antiquité et la souveraineté israélienne réelle contemporaine. L’héroïsme antique et l’audace contemporaine, telles étaient les marques d’identité du sabra viril. Le judaïsme malingre, resté passif au « milieu » du déroulement historique, était perçu comme une étroite passerelle branlante vers la renaissance nationale.

Le service militaire obligatoire a été tout aussi important. Parallèlement à l’enseignement, il a constitué un puissant creuset, créateur d’identité et de cultures originales. Le contact le plus intense des élites avec la masse des immigrés s’est produit par le biais de cet appareil hiérarchique. Celui qui avant d’être enrôlé dans l’armée parlait avec ses parents une langue étrangère méprisée (le yiddish ou l’arabe), se voyait reconnu, après deux ou trois ans passés dans Tsahal, non seulement comme un bon soldat, mais aussi comme bien plus israélien. Il commençait alors à apprendre à ses parents la langue de l’État, et par là même à leur instiller de la honte envers leur ancienne culture, dépourvue de vigueur militaire et de majesté nationale. La situation de forteresse assiégée dans laquelle s’est trouvé Israël, et ses victoires remportées dans les guerres de 1948, 1956 et 1967 ont ajouté de la splendeur à l’israélité et sanctifié le culte de la force en même temps que le pouvoir des élites anciennes.

La culture israélienne s’est solidifiée avec une rapidité qui mérite d’être soulignée. Alors que dans d’autres États, la culture nationale a été façonnée au terme d’un processus relativement long, en Israël, du fait de sa nature intégrale de société d’immigration, une langue et une culture entièrement nouvelles ont été instaurées et transmises en deux générations. Toute la population n’a, certes, pas reçu cette transmission à part égale ; des sous-cultures ont subsisté et perdurent encore aujourd’hui, mais les réussites de l’entreprise sioniste dans le champ culturel, à l’instar des réalisations dans les domaines agricoles et militaires, ne connaissaient pas de précédent.



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