CINQ ÉPISODES D'UNE VIE (TOME 1) by T Combe

CINQ ÉPISODES D'UNE VIE (TOME 1) by T Combe

Auteur:T Combe
La langue: fra
Format: mobi
Tags: Romans
Éditeur: Les Bourlapapey bibliothèque numérique romande
Publié: 2013-12-16T23:07:10+00:00


*** *** ***

L’annonce coûteuse, en anglais cette fois, n’avait produit aucun résultat. Thérèse alla s’inscrire, en payant à l’avance une guinée, dans un bureau de placement bien situé ; et elle y passa tous les jours pendant une quinzaine pour s’entendre répondre : « Rien encore pour vous, miss ! »

La nièce de Mrs Steven, cette Sôphy qui traduisait des circulaires en allemand et en français pour des commerçants, mais qui aspirait à faire des traductions littéraires pour des éditeurs, demanda à Thérèse de lui donner quelques leçons gratuites, en attendant que la roue de la Fortune eût tourné pour elle. Gallimard dit à Thérèse :

– Voyons, Lemaire, vous n’allez pas faire ça ! C’est trop bête à la fin ! Le français, c’est votre capital. Alors si vous le donnez pour rien, qu’est-ce qui vous reste ? Faites un arrangement avec la tante. Votre petit déjeuner, par exemple, en échange d’une leçon…

– Je ne sais pas faire ces combines, murmura Thérèse, qui se sentait un état de grande infériorité vis-à-vis de la science pratique de Gallimard d’ailleurs franche et sans détours.

Elle donna deux ou trois leçons par semaine à Sôphy et découvrit que l’ignorance linguistique de son élève était un abîme sans fond. Les traductions étaient faites à coups de dictionnaire, et le plus souvent au petit bonheur des ressemblances. Ainsi « taille » était traduit par tail, qui signifie queue ; cask, qui est un tonneau, devenait un casque français et réciproquement. Sôphy s’aventurait même dans la conversation ; elle disait : « Je suis faim, je suis soif ! » et pour : « J’ai tort » elle éjaculait : « Je suis tord » ou même : « Je suis tordue… »

Thérèse, le soir, en faisait des imitations embellies et augmentées pour la délectation de Gallimard. À elles deux, elles inventaient des à peu près que Thérèse, le lendemain, inculquait à l’infortunée Sôphy.

– Comment dit-on : not noisy ? interrogeait l’élève.

– Noisy, c’est « qui fait du bruit », n’est-ce pas ? donc bruiteux, répondit Thérèse imperturbable. Vous traduisez votre circulaire : machine à coudre non bruiteuse…

Si elle ne tirait pas un sou de ces leçons de fantaisie, du moins en tirait-elle quelque divertissement. Ainsi les jours passaient vite et assez gaiment.

Quoi qu’eût prétendu Gallimard, Thérèse eut un jour l’impression d’être suivie, peu après être sortie de chez elle. Ce fut une certitude quand elle eut passé à son bureau de placement. On marchait derrière elle, assez près, d’un pas régulier. Sans se retourner elle traversa la chaussée, on traversa aussi. Elle s’arrêta à une devanture, on s’arrêta. Alors brusquement elle fit volte-face et aperçut, souriant de son énigmatique sourire, le Faune d’Endell Street !

– Vous ! s’exclama-t-elle toujours trop pressée.

Et la seconde d’après elle songeait qu’elle aurait dû feindre de ne pas le reconnaître.

– Moi-même, mademoiselle, trop heureux de la rencontre.

– Oh ! rencontre ! fit Thérèse. Il me semble que vous me suivez depuis un bon moment.

– Que diriez-vous si je vous confessais qu’hier



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