CHARADE by LAURENT LOISON

Auteur:LAURENT LOISON [LOISON, LAURENT]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: France Loisirs
Publié: 2015-01-17T23:00:00+00:00

Deux heures interminables s’étaient écoulées. Le Chat avait tiré profit de ce temps pour questionner le planton afin de remonter la piste de l’émissaire.

Un coursier banal, mal rasé, désagréable, le téléphone allumé, en pleine conversation. La lettre n’était pas encore sur le comptoir qu’il avait déjà tourné les talons sans se préoccuper de quoi que ce soit. Le pli n’exigeait aucune signature. Rien de ce côté-là.

L’enveloppe, en papier kraft marron clair de grand format, retenait l’attention des techniciens qui l’analysaient méthodiquement. Le travail minutieux durait.

La déconfiture se lut sur leur visage.

Le résultat se révélait sans appel. Pas la moindre trace de quoi que ce soit d’utilisable. Pas d’empreinte, pas d’ADN. Tous convinrent qu’il était temps de l’ouvrir.

Deux enveloppes blanches, scellées à la cire de bougie.

Elles arboraient solennellement, avec la police de caractères Algerian, désormais annonciatrice de drames, le nom des deux ennemis de la criminelle.

Daniel CHOLLE avait l’honneur d’avoir son patronyme sur celle qui recelait un petit 3 en bas à droite.

Florent BARGAMONT bénéficiait du même privilège avec le chiffre 4.

La noria de techniciens reprit son labeur, sans grand espoir.

Leur métier, pénible et répétitif, dénouait cependant souvent de nombreuses énigmes. La découverte et surtout l’utilisation de l’ADN avaient en effet permis à de nombreux cas en impasse de trouver une issue, et ce parfois vingt ans après les faits.

Pour tuer le temps, Granville et Hellard échangeaient sur des sujets inconséquents. Deux hommes qui ne se livrent jamais. Leur famille restait dans leur cœur en claquant la porte du domicile et il ne la retrouvait qu’à leur retour, dans le confort moelleux de leur foyer.

Une nouvelle vague de visages désabusés donna le signal de l’ouverture des deux enveloppes.

Deux phrases, disposées de la même manière que celles retrouvées sur les scènes de crimes. Tout aussi incompréhensibles.

Le brouillard épais se densifiait encore davantage.

Deux nouvelles questions s’ajoutaient à l’ensemble abstrus.

Pourquoi Cholle était-il mêlé à l’imbroglio ?

Pourquoi le meurtrier leur envoyait-il les lettres au lieu de les déposer à côté des cadavres qui ne manqueraient pas de fleurir ?

La tension devenait insupportable, infernale.

Hellard interrogea Granville :

— On transmet à Florent ?

La réponse du Chat se fit cassante.

— Non, ça lui apprendra à se contrôler. On ne peut pas exploser un collègue comme il vient de le faire sans conséquence. Il a bien de la chance d’avoir cette enquête de m… sur le dos, sinon je lui en aurais collé pour quinze jours. On le prévient dès qu’on a retrouvé les deux cadavres.

— Préviens Cholle en revanche, qu’un des deux soit au moins au courant. Je me tire. Le divisionnaire clôtura la soirée.

— Rentre aussi, J.C. ! On se parle demain.

Gérard se dirigea vers la sortie de la pièce réquisitionnée pour les examens de la scientifique.

Les yeux rivés sur les deux copies, marquées en travers par les lettres annonciatrices de bien mauvaises nouvelles.

Il hochait la tête de gauche à droite.

Refusant l’inéluctable.

Deux jeunes femmes avaient dû souffrir atrocement pour le plaisir abject d’un fou.

Il les relut une dernière fois avant de les plier et de les mettre dans sa poche.

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