Caliban et Prospero suivi d' Autres essais by Jean Guéhenno

Caliban et Prospero suivi d' Autres essais by Jean Guéhenno

Auteur:Jean Guéhenno [Guéhenno, Jean]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Editions Gallimard
Publié: 2016-03-14T23:00:00+00:00


Préface aux « Confessions »

« Le propre de la Confession est de

montrer de préférence les pièces invi-

sibles et de dire surtout ce qu'il fau-

drait taire... Une fois qu'on a goûté à

la réalité des confessions, toute autre

réalité paraît bien littéraire... »

PÉGUY , Solvuntur objecta.

Les Confessions de Jean-Jacques sont un appel pathétique à la Postérité. Il avait confiance en elle. Il pensait que le jugement qu'elle rend est un vrai jugement de Dieu et aucune édition ne peut être plus conforme à son attente et à son espoir que ce « livre de poche » édité tout exprès pour la grande masse des lecteurs. En 1776, deux ans avant sa mort, au comble de l'angoisse, le pauvre homme eut l'idée de distribuer « dans les rues aux inconnus dont la physionomie lui plairait le plus » un lamentable billet adressé « A tout Français aimant encore la justice et la vérité. » Ces Confessions dont il avait laissé deux manuscrits sont tout un livre inspiré de la même angoisse. Puisse le lecteur de ce « livre de poche » le lire avec l'amour de la justice et de la vérité que Rousseau attendait de lui.

Je ne pense pas qu'il y ait beaucoup de plus grands livres européens. Il a tout entier été écrit dans une effrayante tension de l'âme et, pour ses derniers chapitres, aux limites de la folie. C'est « l'histoire la plus secrète d'une âme », comme l'avaient été les Confessions de saint Augustin, dont Jean-Jacques a osé reprendre le titre. Comme, à l'aurore des temps chrétiens, Augustin avait pris « le genre humain » à témoin, confessé à la fois ses fautes et la gloire de Dieu, dressé ce grand portrait d'un homme que travaille la Grâce, il allait peindre un homme, à l'aurore du monde moderne, de ces temps nouveaux qu'il pressentait, et cet homme ce serait lui. Quelle lutte on avait à soutenir pour faire reconnaître son mérite et sa dignité dans la société de son temps, les circonstances et son génie lui avaient permis de le vérifier, et c'est ce que tout le monde pourrait apprendre dans son livre. Augustin, quand il racontait ses péchés, les racontait pour la plus grande gloire de Dieu « contre lui-même », et contre l'homme en général. Jean-Jacques serait moins sévère ; il parlerait pour lui-même et pour l'homme. Il ne croyait pas au péché originel. « Il s'en faut bien selon moi, avait-il écrit à cet archevêque Christophe de Beaumont qui avait fait brûler ses livres, que cette doctrine du péché originel, sujette à des difficultés si terribles, ne soit contenue dans l'Écriture ni si clairement ni si durement qu'il a plu au rhéteur Augustin et à nos théologiens de la bâtir. » Il avait, quant à lui, une autre idée « de la justice et de la bonté de l'Être suprême ». Tels avaient été ses malheurs qu'il avait pu redevenir l'homme de la nature, et il savait que cet homme était sans péché. Les progrès qu'il avait



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