Bullet Train by Kotaro Isaka

Auteur:Kotaro Isaka [Isaka, Kotaro]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Les Presses De La Cité
Publié: 2022-06-16T06:15:02+00:00

LE LISERON

Il passe un coup de fil pour signaler que le travail est fait. À l’autre bout de la ligne, un homme que l’on pourrait qualifier d’intermédiaire. Il fut un temps où lui aussi s’occupait des contrats, il y a des années, mais l’homme a pris du poids et réduit ses activités. Maintenant qu’il a atteint la cinquantaine, il s’est établi comme intermédiaire.

Liseron avait l’habitude de gérer ses propres affaires, mais ces derniers temps c’est l’intermédiaire qui les lui fournit. Il en avait assez de devoir négocier les prix depuis l’opération à grande échelle visant à faire tomber l’organisation Maiden, il y a six ans.

Cette affaire a d’ailleurs commencé au même carrefour. Les souvenirs resurgissent. Un homme qui travaillait comme tuteur, deux enfants et une femme, Brian Jones ; des pâtes. Les images apparaissent sans contexte et dans le désordre, virevoltant dans sa tête, puis se déposent comme de la poussière avant de s’effacer.

— C’est du bon boulot, lui dit l’intermédiaire. Tant que je vous ai…

Liseron a l’impression de sombrer.

— J’ai une bonne et une mauvaise nouvelle, lui dit l’intermédiaire, et Liseron a un sourire acerbe.

L’intermédiaire dit toujours ça.

— Aucune ne m’intéresse.

— Ne dites pas de bêtises. Bon, la mauvaise nouvelle d’abord. Je viens de recevoir un appel urgent de quelqu’un de ma connaissance. Il y a un boulot qui pourrait être un peu pénible, mais qui surtout doit être fait immédiatement.

— Ça n’a pas l’air simple, répond Liseron d’une voix neutre, en faisant un effort pour rester poli.

— Maintenant, la bonne nouvelle. Le boulot aura lieu dans le voisinage actuel.

Liseron s’arrête et regarde autour de lui. Une large avenue et un magasin de proximité, pas grand-chose d’autre.

— Ça ressemble plutôt à deux mauvaises nouvelles.

— Le client, en fait, c’est quelqu’un avec qui j’ai bossé par le passé, quelqu’un qui m’a déjà dépanné. Je ne suis pas en mesure de refuser.

— Ça n’a rien à voir avec moi.

Non que Liseron n’aime pas travailler, mais il préfère éviter de remplir deux contrats dans la même journée.

— Ce type qui me sollicite, je le considère un peu comme mon grand frère. À l’époque, il m’a montré les ficelles du métier. Et lui c’est un vrai de vrai, un vieux de la vieille, reprend l’intermédiaire avec un peu d’excitation. S’il était un jeu vidéo, il serait Hydlide ou Xanadu, un des plus grands.

— Vous allez devoir utiliser une analogie que je peux piger.

— OK, s’il était un groupe de rock, il serait les Rolling Stones.

— Ah, eux je les connais, dit Liseron avec un léger sourire.

— Ou non, plutôt comme les Who, qui se sont séparés, mais qui se remettent ensemble de temps à autre.

— Soit, peu importe.

— Quoi, vous n’appréciez pas les classiques ?

— Tout ce qui existe depuis longtemps mérite respect. Le simple fait de survivre est un gage de supériorité. Bon, c’est quoi ce boulot ?

Il décide d’écouter au moins la proposition. L’intermédiaire paraît heureux de sa bonne volonté, qu’il considère de toute évidence comme une marque de consentement.

Lorsque le descriptif du job est terminé, Liseron en rirait presque aux éclats.

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