Étage 46 by Christian Guillerme

Auteur:Christian Guillerme [Christian Guillerme]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: L'Oiseau Noir
Publié: 2024-02-22T23:00:00+00:00

26

Non seulement le froid n’avait pas diminué, mais il semblait même s’être intensifié. Patrick s’approcha de nouveau de la commande de climatisation. Sa respiration provoquait un début de condensation à peine perceptible.

Il posa la main sur le curseur rotatif, quand un éclat sonore lui parvint du couloir, une cabine venait d’arriver à l’étage. Il écarquilla les yeux, ses paumes devinrent moites et sa respiration haletante ; des pas précipités se faisaient entendre. D’un seul coup, le froid n’avait plus aucune importance, il ne le ressentait même plus.

En prenant une grande inspiration glacée, il récupéra l’extincteur et ouvrit la porte d’un geste brusque. Il progressa en direction des ascenseurs à un rythme soutenu, mais sur ses gardes.

La surprise l’assaillit une fois sur le palier. Toutes les cabines étaient ouvertes telles des bouches géantes attendant silencieusement leur pâture.

Il avança prudemment, comme s’il se trouvait face à des animaux sauvages. Il secoua la tête, il devait se reprendre, il ne s’agissait là que d’assemblages de métal et de plastique, façonnés par la main de l’homme ; elles ne possédaient aucune âme. Il scruta l’intérieur de la première cabine en prenant soin de rester en retrait sur le palier. Il avait beau plisser les yeux et en examiner chaque recoin, elle était totalement vide. Il passa ensuite à la seconde, puis à la troisième et ainsi de suite jusqu’à la cinquième pour aboutir au même constat. Il se pétrifia devant la sixième, celle qui l’avait retenu prisonnier. Elle arborait la tâche d’urine désormais sèche, mais encore bien visible. Il regarda fixement l’intérieur, sans ciller.

Son estomac se souleva à plusieurs reprises. Une multitude de petites gouttes aqueuses étaient étalées en gerbes sur le sol, tel le dessin d’une voie lactée sur un film négatif. Une odeur de fer remontait à ses narines.

Il y avait bien eu quelqu’un dans cette cabine après lui. Pourquoi ce sang ? Où cette personne pouvait-elle se trouver désormais ? Formuler cette pensée provoqua un frisson glacial qui eut pour effet de stopper net sa transpiration ; l’inconnu ne pouvait se trouver qu’ici, au même étage !

La peur s’installa, animale, primaire. Patrick se retourna vivement et scruta les couloirs sombres. Dans lequel avait bien pu s’engager l’inconnu ? Les sens aux aguets, il essaya de définir la meilleure direction à emprunter. Il regarda le sol, mais aucune goutte de sang ne s’y étalait, aucun indice pour lui faire choisir un côté plutôt que l’autre. Il effectua un tirage au sort mental et s’engagea dans le couloir de droite. La lumière glauque et faiblarde lui fit penser au film Alien et aux corridors interminables du vaisseau spatial Nostromo. Il espérait seulement que celui qu’il recherchait n’était pas aussi redoutable que la créature extra-terrestre.

Au bout de quelques enjambées, il arriva en vue d’une porte. Il mit la main sur la poignée et suspendit son geste. Et si quelqu’un se tenait derrière, prêt à lui sauter dessus dès son entrée ? Certes, il avait l’extincteur en sa possession, mais si c’était Philippe, il n’imaginait pas pouvoir lutter avec lui.

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